Il y a plus de 3,5 millions de cas de varicelle chaque année aux Etats-Unis. Si cette maladie éruptive de la petite enfance a la réputation d'être parfaitement bénigne, elle est cependant responsable de 6 000 hospitalisations annuelles, représentant un coût d'environ 400 millions de dollars US.
Les pneumonies interstitielles sont en effet très graves chez l'immunodéprimé, en particulier chez l'enfant leucémique traité par chimiothérapie et corticoïdes. Le virus est aussi tératogène lorsque l'infection est acquise avant la vingtième semaine de gestation : l'atteinte fréquente du parenchyme cérébral se traduit par une encéphalite nécrosante diffuse avec des kystes multiloculaires qui confluent parfois en une vaste cavité porencéphalique. Le nouveau-né, souvent hypotrophique, présente des cicatrices mutilantes, en "zig-zag", séquelles d'une atteinte in utero des nerfs cutanés sensitifs (équivalent d'un zona anténatal).
Mais en dehors de ces cas particuliers, la varicelle peut aussi revêtir une forme sévère : dans un seul centre et sur une période de 10 ans, 103 enfants indemnes de toute anomalie immuno-hématologique ont dû être hospitalisés en raison d'une complication grave de la maladie.
Un syndrome de Reye a été diagnostiqué chez 6 enfants, devant le tableau classique associant une hypertension intracrânienne, des vomissements, une altération de la conscience, une augmentation de l'ammoniémie et des transaminases. Ces 6 enfants recevaient de l'aspirine...
Des dix malades porteurs d'une affection chronique : trisomie 21, eczéma, etc., 9 ont été admis pour déshydratation aiguë. La pathogénie n'en était pas claire mais l'hyperthermie a pu jouer un rôle déterminant sur un terrain favorisant.
Les troubles neurologiques (troubles de la conscience, syndrome confusionnel) ont été assez fréquents en dehors du syndrome de Reye (29/103) : convulsions fébriles, ataxie révélant d'authentiques encéphalites de la varicelle survenant le plus souvent au cours de la phase éruptive et d'évolution bénigne.
Attention aux bactéries
L'infection virale semble faire le lit des complications infectieuses bactériennes et la moitié des enfants hospitalisés avaient une infection cutanée ou une cellulite, parfois très importante justifiant une intervention chirurgicale de drainage. L'incidence des infections à streptocoques Bêtas-hémolytiques du groupe A a augmenté très récemment et est notamment responsable de tableaux sévères rappelant le syndrome de choc toxique staphylococcique (TSSS) associant anomalies hémodynamiques, rash et défaillance polyviscérale. La résurgence de ce germe dans la pathologie infectieuse pédiatrique s'est en effet accompagnée d'une réapparition de sérotypes M, très virulents, produisant une exotoxine pyrogène responsable d'un tableau comparable au TSSS. Quelques cas de syndrome de Lyell staphylococciques ont été aussi rapportés, ainsi que des impétigos diffus, des abcès sous-cutanés. Deux cas de méningite à Hæmophilus sont aussi venus compliquer l'évolution de la varicelle au 6e jour.
La séméiologie radiologique de l'atteinte pulmonaire (n=10) était protéiforme, il s'est agi le plus souvent de condensations lobaires, d'infiltrats interstitiels, ou de pleurésie mortelle dans 2 cas. La distinction entre une surinfection bactérienne et une pneumonie spécifique évoquée classiquement chez l'adolescent en cas d'atteinte précoce de l'interstitium, est difficile. Le moindre doute impose une antibiothérapie après une enquête microbiologique rigoureuse (crachats, antigènes solubles, hémocultures).
Enfin, des complications plus rares méritent d'être citées : glomérulonéphrite aiguë, hépatite, purpura thrombopénique, trachéite staphylococcique, arthrite septique.
Ainsi la varicelle reste une pourvoyeuse de complications graves notamment infectieuses. Le vaccin vivant atténué actuellement disponible est efficace et dénué de toxicité. Toutefois, un certain nombre de questions ne sont pas résolues quant à la durée de la protection et de la latence virale, susceptibles d'entraîner, à long terme, une modification de l'épidémiologie.
Jackson M.A. et coll. : "Complications of varicella requiring hospitalization in previous healthy children". Pediatr. Infect. Dis. J., 1992 ; 11 : 441-445.
Jean-Louis Stéphan