La mise en uvre de la réaction de polymérisation en chaîne (PCR) dans le diagnostic des salpingites aboutit à mettre en cause de plus en plus fréquemment Chlamydia trachomatis. On estime que 10 à 15% des femmes américaines en âge de procréer ont déjà eu au moins un épisode de salpingite, ce qui, traduit à l'échelle des Etats-Unis, ne représente pas moins d'un million de nouveaux cas chaque année... De nombreux micro-organismes ont été incriminés comme étant à l'origine de cette infection, mais les deux plus fréquents sont sans aucun doute Neisseiria gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis. Cependant, tandis que le premier est généralement responsable d'une bruyante symptomatologie clinique qui mène rapidement à sa reconnaissance, tel n'est pas le cas de Chlamydia qui donne des infections dont les symptômes, souvent modérés, peuvent passer inaperçus. Or, le risque évolutif vers un syndrome de douleur pelvienne chronique, de grossesse ectopique, voire de stérilité ultérieure par obstruction tubaire, rend ce diagnostic nécessaire.
L'utilisation de la PCR
Le "gold standard" pour le diagnostic est bien sûr la culture, mais sa mise en uvre est délicate et sa sensibilité faible en raison du caractère intra-cellulaire du germe. Ni la détection par anticorps monoclonaux spécifiques, ni le recours à une hybridation sélective par un fragment d'ADN microbien n'ont de ce fait véritablement amélioré ce diagnostic. Dans ces conditions, il était logique de se tourner vers la PCR, puisqu'on dispose de fragments du génome de Chlamydia pouvant servir d'amorce à cette réaction, théoriquement capable de détecter un seul génome de Chlamydia caché au sein de 100 000 cellules.
La population prise en compte dans cette étude comprenait 15 malades, chez qui le diagnostic de salpingite était affirmé par clioscopie. Un prélèvement endocervical par voie vaginale non invasive était effectué et fragmenté en deux parts pour permettre également la réalisation d'une culture classique ; 12 patientes se plaignant de troubles autres que des douleurs pelviennes (parmi lesquelles 5 femmes consultaient pour des avortement inexpliqués) et 8 témoins sains constituaient le groupe contrôle.
Détecté chez 60% des patientes
C. trachomatis a été détecté par PCR chez 9 des 15 patientes (60%) présentant une salpingite, alors même que la culture n'était positive que deux fois (p<0,02). Dans la crainte de faux positifs (puisqu'on sait que la sensibilité de la technique impose de s'entourer de précautions techniques d'asepsie rigoureuses), la réalité de l'infection évolutive à Chlamydia a été parallèlement confirmée par l'étude de la réponse proliférative lymphocytaire spécifique. Les prélèvements étaient négatifs chez les témoins, sauf chez deux patientes ayant une cervicite, et deux sur cinq des malades ayant subi des avortements, ce qui constituera certainement le sujet de nouvelles études. Enfin, la recherche du germe par PCR a été de nouveau répétée après 4 à 6 mois de traitement antibiotique : un seul des échantillons était encore positif (mais la réaction immune lymphocytaire était indétectable).
Ces résultats demandent certes à être confirmés sur de plus grandes populations, mais tendent déjà à accréditer l'idée que C. trachomatis pourrait bien être beaucoup plus fréquemment en cause dans les salpingites de la femme adulte que nous ne l'imaginions.
Jean Trédaniel
Witkin S.S. et coll. : "Detection of Chlamydia trachomatis by the polymerase chain reaction in the cervices of women with acute salpingitis." Am. J. Obstet. Gynecol., 1993 ; 168 : 1438-1442.
TREDANIEL JEAN