METHOTREXATE : LES ENFANTS AUSSI ?

Méthotrexate : les enfants aussi ?

La polyarthrite juvénile reste une maladie grave qui impose de peser les dangers de traitements dont l'efficacité est loin d'être assurée et le risque de laisser évoluer des symptômes qui pourront se solder par des séquelles fonctionnelles lourdes. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens ne suffisent que dans un tiers des cas à contrôler la maladie et l'on sait que dans 30 à 45 % des cas la polyarthrite est encore active 10 ans après le diagnostic et l'incapacité fonctionnelle similaire à celle de l'adulte. La nécessité d'un traitement de fond apparaît alors évidente.

Or, ni la pénicillamine ni l'hydroxychloroquine n'ont fait la preuve de leur efficacité. De même, la toxicité et la difficulté d'emploi des sels d'or injectables (qui n'ont d'ailleurs pas fait l'objet d'études contrôlées chez l'enfant) rendent leur usage delicat.

Pourtant, une étude à plus d'un titre innovatrice, puisqu'elle a été menée de conserve par les Etats-Unis et l'ancienne URSS, apporte une lueur d'espoir.

E.H. Giannini et coll. ont en effet comparé au moyen d'un essai randomisé, en double aveugle, contre placebo, deux différentes posologies du méthotrexate administré pendant 6 mois dans la polyarthrite chronique juvénile résistante : 10 mg/m2 par semaine (faible dose) et 5 mg/m2 par semaine (très faible dose). Parmi les 127 enfants étudiés, 114 ont pu faire partie de l'analyse d'efficacité.

Une efficacité apparente à faible dose

Après six mois de traitement, 63 % des patients recevant le méthotrexate à faible dose allaient mieux, selon un index composite combinant plusieurs symptômes, contre 32 % des malades traités par méthotrexate à très faibles doses et 36 % de ceux sous placebo (p = 0,013).

Par rapport au groupe sous placebo, les enfants sous méthotrexate à faibles doses avaient également des scores de mobilité et de douleur, un nombre d'articulations atteintes et une vitesse de sédimentation significativement réduits. Seul trois enfants ont dû interrompre le traitement en raison d'effets secondaires modérés. Aucun n'a eu de réaction toxique grave.

Ces résultats positifs constituent pour E.H. Giannini et coll. un argument en faveur de l'utilisation plus précoce du méthotrexate qui s'ajouterait aux autres avantages du produit : voie orale, une seule prise par semaine, absence de complication carcinologique et de répercussion sur la fertilité connues.

Pas de conclusion hâtive

Cet optimisme est cependant tempéré par d'autres auteurs qui soulignent l'absence de mesures directes de l'incapacité fonctionnelle chez les enfants. Plus encore, E. H. Giannini et coll. n'ont pas étudié les conséquences osseuses de leur traitement : le méthotrexate a-t-il une action sur les érosions osseuses ?

De même, l'efficacité de la molécule se poursuit-elle au-delà de 6 mois ? Rien n'est moins sûr. Il a de fait été récemment démontré par F. Halle et A.M. Prieur que même lorsqu'une amélioration était notée dans les 6 premiers mois, la maladie pouvait encore s'aggraver chez certains patients pendant les 6 mois suivant, malgré la poursuite du traitement.

Enfin, la possibilité d'effets secondaires mérite d'être abordée, notamment de fibrose hépatique ou d'atteinte pulmonaire.

S'il existe donc un mouvement actuel en faveur de l'utilisation précoce du méthotrexate dans la polyarthrite chronique juvénile de mauvais pronostic, il reste encore de nombreux points à éclaircir. En particulier, une évaluation de l'efficacité et de la toxicité à long terme apparaît essentielle avant de consacrer définitivement une telle stratégie thérapeutique.

Chantal Guéniot

Giannini E.H. et coll. : "Methotrexate in resistant juvenile rheumatoid arthritis". N. Engl. J. Med., 1992 ; 326 : 1043-1049.

GUENIOT CHANTAL

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article