S. Mattioli et coll. s'inscrivent en faux par rapport à cette hypothèse. En effet, en effectuant une pH-métrie œsogastrique chez soixante-dix patients porteurs d'une dyspepsie non ulcéreuse, ces auteurs ont mis en évidence un reflux biliaire, surtout la nuit et en période interdigestive chez 20 à 30 % des sujets étudiés.
Ces résultats sont à rapprocher de ceux de K. Haruma et coll., qui ont étudié l'effet du tabac sur la motricité antroduodénale. Pour ces auteurs japonais, le tabac ralentit la vidange gastrique et surtout augmente le reflux duodéno-gastrique, ce qui pourrait peut-être expliquer une partie des résultats obtenus par l'équipe de Mattioli. Au cours de la dyspepsie non ulcéreuse, une hypersensibilité gastrique avec distension a d'autre part été mise en évidence ces demières années par plusieurs équipes.
Les malades ayant une dyspepsie présentent une réponse tonique
Dans ces dernières études, les caractéristiques mécaniques de l'estomac étaient normales. L.E.A. Tronçon et coll. ont étudié, grâce à un barostat électronique, la réponse tonique de l'estomac après un repas chez des patients porteurs d'une dyspepsie non ulcéreuse et chez des sujets vagotomisés. Les malades ayant une dyspepsie présentaient une réponse tonique, c'est-à-dire une relaxation du fundus, normale après un repas standard, et identique à celle des sujets témoins.
Par ailleurs, chez des sujets vagotomisés, la réponse du tonus fundique était anormale après un repas, et il existait une très bonne corrélation entre la diminution de cette réponse motrice et l'intensité des symptômes rapportés chez les patient vagotomisés.
Ainsi, les symptômes post-prandiaux des patients dyspeptiques seraient bien liés à une hypersensibilité gastrique à la distension.
Comment faut-il traiter ?
Le problème de la nécessité d'une prise en charge thérapeutique est actuellement controversé. Faut-il effectuer un traitement anti-sécrétoire de manière empirique chez les patients ayant une dyspepsie non ulcéreuse ou bien pratiquer des investigations préalables ? P. Bytzer et coll. ont effectué une étude prospective comparant les coûts respectifs d'un traitement anti-sécrétoire empirique et d'une fibroscopie rapide chez des patients ayant un syndrome dyspeptique postprandial de cause indéterminée. Chez 68 des 208 patients ayant eu une fibroscopie, une lésion organique a été découverte et traitée. A un an, le coût a été plus élevé chez des patients ayant eu un traitement anti-sécrétoire empirique que chez les patients ayant bénéficié d'une fibroscopie. Mais cette différence semble essentiellement liée aux nombreux arrêts de travail survenus dans le groupe de patients recevant un traitement empirique et ce résultat ne permet donc pas de trancher.
Benoît Coffin