Attention, danger pour le foie

La vitamine A est connue pour son hépatotoxicité à doses suprathérapeutiques. Une étude bruxelloise vient d'être publiée à propos de 41 patients vus en 13 ans souffrant d'hépatopathies souvent sévères liées à la prise de vitamine A à doses thérapeutiques. Le diagnostic en a été affirmé sur l'aspect histologique comprenant une hyperplasie et une hypertrophie des cellules de Ito associées à la présence de vacuoles fluorescentes aux rayons ultraviolets, sur une histoire clinique compatible avec ce diagnostic et sur l'absence d'autre hépatopathie ou d'hyperplasie des cellules de Ito. La responsabilité de la vitamine A n'a été suspectée que 13 fois avant la biopsie hépatique qui a permis de poser le diagnostic de façon sûre dans tous les cas.

L'indication de traitement par la vitamine A était le plus souvent dermatologique (29 cas), ophtalmologique ou ORL. Cette prise médicamenteuse a été continue dans 26 cas et discontinue dans les 15 autres. La quantité d'alcool ingérée a été le plus souvent modérée (moins de 50 g/j dans 36 cas), et une association médicamenteuse a été rarement trouvée (amiodarone : 2, disopyramidel, fer : 2). La dose moyenne quotidienne ingérée était de 95 806 ± 17 209 UI pendant 7,17 ± 2,1 ans. La consommation de vitamine A a été plus importante chez les cirrhotiques que chez les non cirrhotiques et sa durée plus étendue.

La prévalence de l'hypertension portale a été élevée (51 % des patients avaient des varices œsophagiennes et 27 % avaient saigné). Le pronostic de ces hépatopathies était sévère, avec 22 % de décès à 4 ans 1/2 (6 fois par insuffisance hépatocellulaire et 3 fois par cancer extrahépatique). Deux patients ont dû être transplantés pour insuffisance hépatocellulaire. Le tableau biologique associait une cytolyse modérée, une cholestase anictérique et une augmentation des IgM, ce qui évoquait le tableau de la cirrhose biliaire primitive débutante. L'AgHBc a été trouvé chez un patient et le virus non A-non B soupçonné chez un autre. Il n'a pas été fait de recherche du virus C mais aucun patient n'avait été transfusé.

17 cas de cirrhose au total

Histologiquement, il a été mis en évidence une hépatite chronique persistante chez 7 patients, une hépatite chronique peu active chez 3, une stéatose microvésiculaire chez 6, une fibrose sinusoïdale chez 4, une péliose chez 1 et une hypertension portale non cirrhotique chez 5. L'hyperplasie des cellules de Ito prédominait dans l'espace porte en cas de prise ancienne, dans le lobule dans les cas de prise récente. Vingt-trois patients étaient encore sous vitamine A lors du diagnostic, mais l'arrêt n'a permis qu'une amélioration biologique sans empêcher l'évolution vers la cirrhose. Cette étude est la première à montrer que la prise de vitamine A à doses thérapeutiques est susceptible d'entraîner des hépatopathies sévères parfois fatales. Une meilleure information des médecins et des malades est nécessaire et urgente.

Diana Thierman-Duffaud

Références
Geubel A.P. et coll. : "Liver damage caused by therapeutic vitamin A administration". Gastroenterology, 1991 ; 100 : 1701-1709.

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