MENOPAUSE : LA PREVENTION PAR LES ESTROGENES

L'effet protecteur cardio-vasculaire des estrogènes chez la femme ménopausée a fait l'objet de nombreuses recherches épidémiologiques.

Une étude réalisée par A. Nabulsi et coll. à partir d'un effectif de 4 958 femmes ménopausées a permis une analyse biologique comparative entre quatre groupes de sujets : les femmes utilisant les estrogènes seuls, celles recevant une association, celles n'ayant jamais utilisé une hormonothérapie et les femmes en ayant pris avant la ménopause.

Les éléments de l'étude ont comporté les taux plasmatiques des lipides (cholestérol, triglycérides, Lp (a), HDL-C et ses sous-fractions HDL 2 et HDL 3, LDL-C, Apo A1 et Apo B), du glucose, de l'insuline, les facteurs hémostatiques (fibrinogène, facteurs VII et VIII, facteur de Willebrand, protéine C et antithrombine III), ainsi que les chiffres de pression artérielle.

Approximativement 63% des femmes incluses dans l'analyse n'avaient jamais pris de traitement substitutif et 16% d'entre elles en avaient utilisé antérieurement. Parmi les 21% restant, correspondant aux femmes sous traitement hormonal, 83% prenaient des estrogènes seuls (Prémarin®) et 17% une association avec des progestatifs (acétate de médroxy-
progestérone).

Chez les utilisatrices d'estrogènes seuls, les taux moyens de triglycérides sanguins étaient significativement plus élevés que chez les autres femmes. En revanche, l'association à la progestérone a compensé cet effet par une augmentation de la clairance et une diminution de la synthèse de ces triglycérides. Il a également été noté une augmentation des taux de HDL-cholestérol, ainsi que des sous-fractions HDL-3 et HDL-2 et des Apo A1-lipoprotéines, et ceci que les estrogènes soient utilisés seuls ou en association à la progestérone. Ces effets des estrogènes sur le HDL et le HDL-2-cholestérol sont habituellement attribués à une diminution d'activité de la lipase. En revanche, le LDL-cholestérol, l'Apo B-lipoprotéine et le taux de Lp(a) ont été significativement diminués. L'abaissement du LDL-cholestérol serait secondaire à une augmentation de sa clairance plasmatique sous estrogènes.

La diminution du taux de Lp(a) apparaît intéressante puisqu'il est génétiquement déterminé et, a priori, peu sensible aux divers facteurs environnementaux.

De même, sous traitement substitutif, les taux de fibrinogène et d'antithrombine III ont été abaissés. Sous estrogènes seuls, le facteur VII et la protéine C ont été significativement plus élevés. Aucune différence n'a été notée entre les divers groupes pour les facteurs VII et Willebrand. Notamment, le taux de facteur VII n'a pas été modifié lorsque le traitement était une association. Les utilisatrices ont également présenté des glycémies et des insulinémies plus basses. Enfin, les pressions artérielles systoliques et diastoliques n'ont pas différé entre les quatre groupes.

Risque coronarien : - 42 %

Le principal handicap de cette étude non randomisée réside dans le manque de précision quant à la nature, la posologie et la durée du traitement. Par ailleurs, l'acétate de médroxyprogestérone, habituellement prescrit aux Etats-Unis et principalement utilisé dans cette étude, est susceptible de "déféminiser" le profil lipidique. Les médecins français disposent, quant à eux, de plusieurs progestatifs de synthèse pratiquement dénués d'effet androgénique et neutres au plan métabolique.

On ignore également les motifs de la mise en œuvre de l'hormonothérapie ou de l'abstention. Malgré tout, ces résultats sont en accord avec la plupart des observations précédentes, et traduisent l'action préventive bénéfique des estrogènes, notamment en association avec les progestatifs, sous réserve du bon choix de ceux-ci (c'est-à-dire à faible activité androgénique). Après ajustement, cette étude fait apparaître une réduction de 42 % du risque coronarien chez les femmes traitées, chiffre particulièrement appréciable lorsque l'on connaît l'évolution de celui-ci après la ménopause.

Néanmoins, on attend l'étude randomisée qui permettra de faire le consensus sur ce sujet...

 

Nabulsi A. et coll. : " Association of hormone-replacement therapy with various cardiovascular risk factors in postmenopausal women ". N. Engl. J. Med., 1993 ; 328 :1069 -1075.

Tirés à part: Dr. Folsom, Division of Epidemiology, School of Public health, University of Minnesota, 1300 S.Second St., Suite 300, Minneapolis, MN 55454. Etats-Unis.

Joëlle Bozet-Chahbenderian

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