Il existe deux types d'angio-endothéliomatose. L'une est maligne : c'est un lymphome intravasculaire qui peut infiltrer les vaisseaux de nombreux organes. L'autre est bénigne, réactive et encore mal connue. Une infection n'est pas obligatoire pour qu'elle se développe contrairement à ce qui avait été initialement suggéré. La prolifération est faite de cellules endothéliales et de péricytes et on note fréquemment des dépots de fibrine suggérant que l'angio-endothéliomatose bénigne pourrait être une complication inhabituelle de la vascularite leucocytoclassique.
L'occlusion elle-même des lumières vasculaires joue probablement un rôle dans l'apparition de cette prolifération vasculaire, puisqu'elle a été effectivement décrite au cours de thromboses vasculaires sans inflammation des vaisseaux (par exemple, les thromboses liées à un anticoagulant lupique) Enfin, il est possible qu'un certain nombre des cas rapportés soient liés à une cryoglobuline, celle-ci n'étant pas systématiquement recherchée...
Trois observations
Leboit et coll. rapportent ainsi les observations de trois patients présentant des papules érythémateuses ou des ulcérations des extrémités parfois déclenchées par l'exposition au froid. L'exploration biologique révélait dans tous les cas la présence soit d'une cryoprotéinémie soit d'un cryofibrinogène sérique. L'étude histologique des éléments cutanés montrait des amas de capillaires semblant centrés sur les plexus dermiques superficiels et profonds. Des cellules fusiformes étaient notées autour des capillaires au sein d'un stroma mucineux. Les lumières vasculaires étaient souvent dilatées avec des cellules endothéliales aplaties. Un certain nombre de vaisseaux étaient obstrués par des thrombi éosinophiles, image classique au cours des cryoglobulinémies. On notait enfin dans deux cas la présence de quelques polynucléaires neutrophiles au pourtour des capillaires sans qu'il y ait cependant de véritable vascularite leucocytoclasique. Les cellules fusiformes de la prolifération n'exprimaient pas les antigènes des cellules d'origine vasculaire mais d'origine conjonctive (vimentine +). Celles situées immédiatement au pourtour des lumières vasculaires étaient d'origine musculaire, ce qui signe la présence de péricytes dans la prolifération. L'angiomatose déclenchée par les dépôts de cryoglobuline dans les vaisseaux semble donc correspondre à une réaction exagérée à leur occlusion.
Ces observations sont particulières par l'importance de la prolifération vasculaire. Des images proches ont déjà été décrites au cours des cryoglobulinémies et dans une série de 72 observations, des anomalies vasculaires de même type ont été notées dans 8 cas.
Diagnostic différentiel
histologique
Le diagnostic clinique se pose avec les engelures mais l'histologie est différente avec dans ce dernier cas des infiltrats lymphocytaires périvasculaires dermiques. Sur le plan histologique diverses entités peuvent se discuter comme les hémangiomes gloméruloïdes qui se rencontrent dans le POEMS syndrome, mais pas en position acrale. Des dépôts protéiques sont ici aussi présents mais situés dans des cellules endothéliales, qui forment des structures ressemblant à des glomérules rénaux.
L'hémangiome lobulé se localise quant à lui le plus souvent sur le tronc chez des enfants ou des adolescents. Ils sont faits de lobules de capillaires dont la lumière est dilatée et irrégulière au centre des lobules et petite et régulière en périphérie.
Le sarcome de Kaposi peut revêtir une distribution acrale mais les vaisseaux y sont anguleux plutôt qu'arrondis. Il n'y a pas de péricytes au sein de la prolifération ni de stroma myxoïde. Enfin, les thromboses vasculaires sont rares.
Le pseudo-Kaposi a un aspect histologique semblable à celui de l'angio-endothéliomatose bénigne mais n'occupe que le derme superficiel. La forme secondaire à des thromboses veineuses est le type Mali, celle secondaire à des fistules artério-veineuses est le type Bluefarb-Stewart.
Leboit P.E., Solomon A.R., Santa Cruz D.J., Nick M.R. : "Angiomatosis with luminal cryoprotein deposition". J. Am., Acad. Dermatol. 1992 ; 27 : 969-73.
Alexiane Dallot