Les hommes présentant un syndrome de Klinefelter avec caryotype 47, XXY sont toujours considérés comme stériles. Toutefois, de façon exceptionnelle, des spermatozoïdes matures sont retrouvés lors des biopsies testiculaires. L'équipe du laboratoire de biologie moléculaire de Milan nous rapporte un cas de fertilité chez un patient présentant un syndrome de Klinefelter, confirmé par l'étude du caryotype 47, XXY effectuée sur les lymphocytes et les fibroblastes, et dont la paternité biologique a été assurée par l'analyse de l'ADN ftal sur un prélèvement de villosités choriales.
Le patient, âgé de 32 ans, était le 7e enfant d'un couple non consanguin et ne présentait aucun antécédent médical particulier. Marié à 22 ans avec une jeune femme de 20 ans, en bonne santé, les époux ont consulté pour un bilan de 5 ans d'infertilité. Le diagnostic d'hypogonadisme en rapport avec un syndrome de Klinefelter a alors été porté.
A l'examen clinique, l'homme était grand et mince, avec des signes de virilisation insuffisants, des testicules de petite taille et pas de gynécomastie. L'étude cytogénétique, portant sur 52 métaphases de culture lymphocytaire, a révélé un caryotype 47, XXY. Les taux de gonadotrophines et d'androgènes étaient compatibles avec le diagnostic et le spermogramme montrait une azoospermie totale.
Une proposition d'insémination artificielle par donneur a alors été formulée, mais a été refusée par le couple.
C'est alors à l'âge de 31 ans que la femme du patient a été spontanément enceinte et le couple adressé en consultation pour conseil génétique. Un prélèvement de villosité choriale a été réalisé à 10 semaines d'aménorrhée et il a été proposé au couple de bénéficier d'investigations plus complètes dans le but de confirmer le diagnostic de syndrome de Klinefelter et de s'assurer de la paternité biologique du mari.
Révélation cytogénétique
L'analyse chromosomique sur lymphocytes de sang périphérique de la mère a mis en évidence un caryotype normal 46, XX. Les lymphocytes du mari ont été cultivés à partir de deux échantillons différents de sang périphérique, représentant un total de 512 métaphases analysées : toutes ont confirmé le diagnostic de caryotype 47, XXY.
L'étude cytogénétique a ensuite été étendue aux fibroblastes mis en culture après biopsie cutanée. Les 507 métaphases étudiées, à partir de 5 cultures cellulaires différentes, ont encore confirmé le caryotype 47, XXY. Le patient a refusé de subir une biopsie testiculaire.
Un diagnostic prénatal a ensuite été établi après prélèvement de villosités choriales, par voie transabdominale, à 10 semaines d'aménorrhée. Sur 30 mg de tissu prélevé, 10 mg ont été utilisés pour l'analyse chromosomique qui a relevé un caryotype normal (46, XX). Les 20 mg restant ont été utilisés pour l'étude de l'ADN embryonnaire.
La voix de l'ADN
L'ADN des parents et de l'embryon a été isolé et analysé par hybridation Southern blot à partir des villosités choriales pour l'enfant, des lymphocytes du sang périphérique pour les deux parents.
La probabilité de paternité biologique, calculée selon l'équation d'Essen Moller, utilisant la fréquence des allèles dans la population italienne, était de 99,998 %. Cette observation rapporte donc le premier cas de fertilité chez un homme ayant un syndrome de Klinefelter, dont la paternité biologique a pu être confirmée par les empreintes de l'ADN.
Deux autres cas avaient déjà été signalés, dont l'un pour lequel la paternité avait été affirmée sur l'étude des systèmes HLA.
Une explication possible de ces cas exceptionnels est l'existence de mosaïques limitées au tissu testiculaire, permettant la production occasionnelle et la libération dans l'éjaculat de spermatozoïdes viables et matures.
Danièle Gonod
Terzoli G. et coll. : "Fertility in a 47, XXY patient : assessment of biological paternity by deoxyribonucleic acid fingerprinting". Fertility Sterility, 1992 ; 58 : 821-822.
GONOD DANIELE