Le syndrome des antiphospholipides (APL) a été reconnu relativement récemment (1988 - 1989). Il se définit, d'une part par la présence d'anticorps antiphospholipides : fausse sérologie syphilitique et/ou anticoagulant de type antiprothrombinase et/ou anticorps anticardiolipine, et, d'autre part, par l'existence de manifestations cliniques et biologiques particulières comprenant des thromboses veineuses et/ou artérielles fréquemment récidivantes, des avortements à répétition, une thrombopénie et un livedo.
Lupus sans APL
Lorsque ces antiphospholipides sont présents dans le cadre d'un lupus érythémateux systémique (LES), des lésions cardiaques valvulaires (végétations non infectieuses, épaississement valvulvaire, régurgitation) sont observées avec une fréquence plus élevée que dans les LES sans APL. Ainsi, les APL pourraient être des marqueurs de cardite lupique et un rôle pathogénique pourrait leur être attribué.
En l'absence de LES, la présence d'APL et des manifestations thrombotiques sus-décrites correspond à un syndrome primaire des APL. Des manifestations cardiaques identiques à celle du LES ont déjà été décrites dans ce cadre. Le rôle pathogénique des APL pourrait donc être évoqué.
L'étude menée par Carolyn Gleason (Louisville, USA) a cherché à déterminer si les APL constituent le seul facteur de risque d'apparition des lésions valvulaires. Elle a donc comparé des patients ayant un syndrome primaire des APL et des patients ayant un LES sans APL. Après appariement, un groupe de 10 patients avec syndrome primaire des APL a été comparé à 20 patients avec LES sans APL et 20 sujets sains. Tous les sujets ont eu une recherche d'APL par technique ELISA et une écho Doppler trans-thoracique.
Parmi les patients avec syndrome primaire des APL, 60% avaient des lésions cardiaques valvulaires contre 40% des patients avec LES sans APL, (différence non significative) et aucun des sujets témoins.
Ainsi, les lésions valvulaires cardiaques sont fréquentes aussi bien en cas de syndrome primaire des APL qu'en cas de LES sans APL.
Ces résultats suggèrent deux possibilités : soit les antiphospholipides n'ont pas de rôle pathogénique, soit il existe d'autres facteurs de risque pouvant expliquer le développement des lésions valvulaires.
Gleason C.B. et coll. : "A comparison of cardiac valvular involvement in the primary antiphospholipid syndrome versus anticardiolipin-negative systemic lupus erythenatosus". Am. Heart J., 1993 ; 125 : 1123-1129.
Nihoannopoulos P. et coll. : "Cardiac abnormalaties in systemic lupus erythematosus - association with raised anticardiolipin antibodies". Circulation, 1993 ; 82 : 369-375.
Alain Millaire