IMMUNISATION CONTRE HAEMOPHILUS INFLUENZAE

IMMUNISATION CONTRE HAEMOPHILUS INFLUENZAE

IHaemophilus influenzae est une bactérie commensale des muqueuses des voies respiratoires supérieures. Son portage est en effet banal et compatible avec un bon état de santé. Néanmoins, Haemophilus peut devenir pathogène, en particulier le type B encapsulé, responsable d'infections bactériémiques à type d'épiglottite ou de méningite.

Ainsi, en Grande-Bretagne, les données épidémiologiques montrent que la probabilité pour un enfant de contracter un infection invasive à Haemophilus de type B avant l'âge de 5 ans est de 1/600 et la probabilité que cela soit une méningite de 1/850. Ce germe est responsable de 65 décès par an. Les chiffres publiés en Europe du nord, aux Etats-Unis et en Australie sont comparables.

Les données diponibles sur la morbidité sont plus restreintes. Si les séquelles neurologiques importantes sont peu fréquentes après une méningite, les séquelles mineures à type de déficit auditif atteignent 6 % des survivants ; aucune statistique n'a été effectuée sur les séquelles à type d'incoordination motrice, trouble de l'intelligence, ou difficultés d'apprentissage. Ainsi l'impact des méningites à Haemo-philus semble être analogue à celui de la poliomyélite avant l'introduction de la vaccination systématique. En outre, une augmentation de la fréquence de la méningite à Haemophilus a été observée en Grande-Bretagne depuis 10 ans, et s'accompagne d'une diminution de la sensibilité aux antibiotiques, ce qui modifie l'efficacité du traitement : environ 11 % des isolats sont maintenant résistants à l'ampicilline et quelques-uns au chloramphénicol.

La capsule de type B, composée de polyribosyl-ribitol-phosphate (PRP), est un facteur crucial de la virulence d'Haemophilus, et les anticorps sériques dirigés contre elle peuvent avoir un rôle protecteur. Malheureusement, l'immunocompétence n'atteint sa maturité qu'après quelques années. C'est pourquoi les jeunes enfants sont particulièrement sensibles à ce germe et à sa dissémi-nation hématogène potentielle (70 % des cas chez les moins de 2 ans).

Depuis 20 ans des efforts intensifs ont donc été faits pour développer un vaccin.

Le PRP étant faiblement immunogène à l'état natif chez l'enfant de moins de 2 ans, sa liaison à une protéine porteuse permet d'obtenir un vaccin conjugué et donc une réponse immunitaire au polysaccharide, suffisante pour protéger contre la maladie. Cette réaction entraîne une mémoire immunologique et permet une réponse rebond en cas de nouvelle exposition à l'antigène.

Quatre vaccinsmis au point

Quatre vaccins de type B ont été développés et évalués au cours d'essais cliniques : PRP-D des laboratoires Connaught, PRP-T des laboratoires Pasteur-Mérieux, PRP-OMP des laboratoires Merck-Sharp et Dohme, et HbOC des laboratoires Lederle. Les nourrissons ont reçu 2 ou 3 injections intra-musculaires entre l'âge de 2 et 6 mois. La comparaison entre les différents lots de vaccins n'est toutefois pas possible en raison d'un trop grand nombre de variables non contrôlées. Dans tous les cas cependant, les vaccins conjugués ont entraîné un titre d'anticorps contre la capsule de type B, significativement plus élevé que chez les nourrissons témoins. On considère en général qu'un taux supérieur à 0,15 µg/ml est corrélé avec une protection à court terme. Bien qu'il soit trop tôt pour juger des mérites relatifs de ces 4 vaccins, il apparaissent tous utilisables chez le nourrisson.

Ces vaccins sont bien tolérés et aucun effet secondaire sérieux n'est survenu au cours des essais réalisés. L'un d'entre eux est d'ailleurs déjà utilisé de façon courante aux Etats-Unis. Ils sont immunogènes à partir de 2 mois mais de nombreux facteurs affectent la réponse immunitaire : l'âge de début de la vaccination, l'intervalle entre les injections, et le choix du conjugué. La réponse peut être, également, influencée par des facteurs génétiques. Le PRP-D est le moins immunogène chez les nourrissons ; le PRP-OMP et, dans une moindre mesure, le PRP-T, entraînent une production d'anticorps notable dès la première injection tandis que HbOC et PRP-D ne la provoquent qu'après la deuxième dose. La réponse aux injections de rappel est moins importante pour le PRP-OMP.

Quant aux études d'efficacité, elles ont montré que PRP-D, PRP-OMP et HbOC prévenaient plus de 90 % des infections à H. influenzae de type B.

Le PRP-D s'est cependant révélé inefficace dans une étude effectuée chez des enfants en Alaska, en raison de sa plus faible immunogénicité et des caractéristiques particulières de l'épidémie dans cette région.

L'étude de l'efficacité du PRP-T n'est pas complète mais il est utilisé de façon routinière en Finlande et a aussi été testé aux Etats-Unis.

Quand vacciner ?

Il est possible d'effectuer la vaccination contre Haemophilus en même temps que celles contre la dipthérie, la coqueluche, le tétanos et la poliomyélite. Il est même envisageable de mélanger dans la même seringue les différents vaccins plutôt que de faire 2 injections distinctes le même jour, innovation sensible qui pourrait augmenter l'acceptabilité de cette vaccination. La nécessité d'une injection de rappel n'est pas encore démontrée, mais il n'existe pas de données suffisantes sur la durée de la protection après l'immunisation des nourrissons.

Les centres de surveillance bactériologique de chaque pays devront jouer un rôle important pour dire, arguments à l'appui, si la vaccination est acceptable et efficace. Les études contre placebo ne sont, en effet, plus éthiques et les études prospectives difficiles à réaliser et de coût prohibitif.

A suivre donc, d'autant que le développement de vaccins conjugués dirigés contre des polysaccharides de capsule bactérienne ouvre des perspectives vaccinales contre d'autres bactéries encapsulées comme le pneumocoque, le méningocoque, les coliformes et les streptocoques du groupe B.

Nicole Triadou

Granström M. et coll. : "Specific immunoglobulin for treatment of whooping cough". Lancet, 1991 ; 338 : 1230-1232.

TRIDOU NICOLE

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