Les études physiopathologiques avaient déjà démontré que les cytokines interleukine-lß et le Tumor Necrosis Factor (TNF) intervenaient dans les tout premiers phénomènes inflammatoires de la méningite bactérienne. Ceux-ci perturbent la barrière hémoméningée, l'autorégulation cérébrovasculaire, la dynamique du liquide céphalorachidien (LCR) et le métabolisme cérébral.
Dans le modèle expérimental de méningite à Haemophilus influenzae, une seule injection IV de ceftriaxone induit en 2 heures, une élévation de 40 à 600 fois des concentrations intra-rachidiennes de lipo-oligosaccharides d'Haemo-philus influenzae libérés des membranes lors de leur lyse rapide. Dans le même temps la concentration de TNF dans le LCR augmente de 10 fois, tout comme celle des globules blancs, des protéines et des lactates, alors que la glycorachie diminue.
Si la dexaméthasone est administrée avant la ceftriaxone, l'activité TNF dans le LCR est réduite ainsi que les signes inflammatoires. Des résultats similaires ont été observés dans le cas d'une méningite à pneumocoque avant l'addition d'ampicilline, et dans le cas d'une méningite à Escherichia coli avant l'administration de céfotaxime.
Deux équipes pédiatriques, l'une à Dallas, l'autre à San Jose (Costa Rica) ont mené conjointement une étude en double aveugle versus placebo, chez 101 enfants âgés de 6 semaines à 13 ans présentant une méningite bactérienne. Cinquante- deux ont été traités par dexaméthazone et céfotaxime, et 49 par céfotaxime et placebo. La dexaméthazone a été administrée à raison de 0,15 mg/kg, 15 minutes avant la première injection de céfotaxime, et a été poursuivie toutes les 6 heures pendant 4 jours.
Douze heures aprés le début du traitement, la pression du LCR a baissé permettant une amélioration de la pression de perfusion cérébrale chez les enfants recevant la dexaméthasone. En revanche, ces chiffres se sont aggravés chez ceux qui recevaient le placebo et la céfotaxime. Après ce même intervalle ont été également diminués, dans le groupe dexaméthazone, les signes inflammatoires et les concentrations du TNF et du facteur d'activation plaquettaire dans le LCR. En revan-che, leurs valeurs se sont élevées dans le groupe recevant uniquement la céfotaxime. A la 24e heure, l'état clinique était nettement meilleur dans le groupe dexaméthazone.
A long terme (15 mois), le taux de séquelles a été près de 4 fois plus élevé chez les enfants ayant recu le placebo.
Débutée avant antibiothérapie, la dexaméthazone semble donc apporter un bénéfice appréciable dans le traitement des méningites bactériennes de l'enfant.
Christian Hadrzynski
Odio C.M. et coll. : "The beneficial effects of early dexamethasone administration in infants and children with bacterial meningitis". N. Engl. J. Med., 1991 ; 324 : 1525-1531.
HADRZYNSKI CHRISTIAN