Paris, le mercredi 6 septembre 2006 – Alors que le ministre de la Santé a récemment renoncé à se ranger derrière l’avis de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et la toxicomanie (MILDT), qui souhaitait un classement de la buprénorphine parmi les stupéfiants, le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) revient sur l’efficacité de la politique française de réduction des risques chez les toxicomanes. La mise en place en 2004 de l’étude Coquelicot par l’Institut national de veille sanitaire (InVS) menée à Lille, Strasbourg, Paris, Bordeaux et Marseille auprès d’usagers de drogue (UD) fréquentant les centres de soins spécialisés permet en effet de mieux connaître la séroprévalence du VIH et du VHC chez ces patients et de mieux évaluer l’impact de la politique de réduction des risques.
Il apparaît, comme l’avaient déjà révélé plusieurs études internationales, que les différentes stratégies de réduction des risques auront été moins efficaces pour le VHC que pour le VIH. Pour évaluer leur impact, les responsables de l’étude, Marie Jauffret-Roustide et ses confrères ont divisé les 1 462 toxicomanes qui ont accepté de répondre à leur questionnaire (et parmi eux les 1 155 qui ont accepté le dépistage du VHC et du VIH) en deux groupes d’âge, d’une part ceux de plus de trente ans, dont l’entrée dans la toxicomanie a précédé les premiers pas de la politique de réduction des risques et d’autre part ceux de moins de trente ans qui ont toujours connu ces stratégies. Cette classification fait apparaître de nettes différences, notamment en ce qui concerne le VIH : la prévalence de celui-ci est de 17 % chez les toxicomanes de plus de 35 ans et est presque nulle (0,3 %) chez les moins de 30 ans. Concernant la séroprévalence du VHC, elle est de 28 % chez les moins de 30 ans, quand elle atteint plus de 71 % chez les plus de 40 ans ; la séroprévalence totale étant de 59,8 %. La différence entre le VIH et le VHC apparaît également dans la connaissance de leur statut sérologique par les UD : 27 % d’entre eux pensent à tort être épargnés par l’hépatite C, tandis que seuls 2 % des séropositifs pour le VIH ignorent l’être.
Face à ces résultats, les chercheurs de l’InVS estiment que la persistance des pratiques à risque « constitue une condition favorable à la poursuite de la transmission du VHC, mais aussi du VIH ». Ils regrettent en outre que ces chiffres, qui sont les premières estimations précises de la prévalence des deux virus chez les toxicomanes, ne concernent que les UD habitués des centres de soins et ne prennent pas en compte la population dite « cachée ».
A.H.