La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) et l'intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires (Eyes Movement Desensitization and Reprocessing ; EMDR) sont les traitements de choix du syndrome de stress post-traumatique [SSPT]). La place de ces thérapies tient à leur efficacité prouvée lors d'essais cliniques randomisés, mais basée sur des traumatismes non liés à des actes de terrorisme, comme les gros accidents de la circulation ou les viols. La seule étude publiée évaluant l'efficacité de la TCC dans le cadre du SSPT est un essai ouvert (non contrôlé, non randomisé) sur les survivants du car piégé d'Omagh, Irlande du Nord, en 1998. Les résultats ont été comparables à ceux trouvés dans les essais randomisés pour les SSPT non liés au terrorisme.
Pour évaluer l'efficacité de la TCC dans le SSPT lié au terrorisme et aux autres conflits civils, une équipe d'Irlande du Nord a réalisé un essai contrôlé dans lequel 58 patients ont été inclus. Il s'agit de patients porteurs de SSPT chroniques (médiane de 5,2 ans ; entre 3 mois et 32 ans d'évolution), en majorité liés au terrorisme et aux autres conflits civils. Deux groupes de patients ont alors été constitués : intervention immédiate versus liste d'attente de 12 semaines suivie par le traitement. Le traitement comportait en moyenne 5,9 sessions de TCC pendant 12 semaines et 2 sessions par la suite. L'évaluation de l'intervention s'est basée sur les scores obtenus par les patients sur l'échelle diagnostique du stress post-traumatique et au questionnaire de Beck pour la dépression, critère principal de l'essai, ainsi que les scores concernant les fonctions sociales et professionnelles (difficultés professionnelles, sociales et familiales) évaluées selon l'échelle DSD (Sheehan disability scale), critère secondaire de l'étude.
Les résultats ont montré que 12 semaines après la randomisation, la TCC immédiate a été significativement associée à une amélioration plus nette des symptômes du SSPT (différence moyenne = 9,6 ; IC à 95 % : 3,6 – 15,6), de la dépression (différence moyenne = 10,1 ; IC à 95 % : 4,8 – 15,3) et de l'échelle DSD (différence moyenne = 1,3 ; IC à 95 % : 0,3 – 2,5) par rapport aux patients du groupe liste d'attente. Pour estimer l'étendue des améliorations des scores entre les périodes avant et après traitement, les auteurs ont calculé les indices d'effet (IE), selon la formule IE = (score moyen avant traitement – score moyen après traitement)/déviation standard. D'après la classification de Cohen, un IE est considéré faible s'il est entre 0,2 et 0,49 ; moyen s'il est entre 0,5 et 0,79 et important s'il dépasse 0,8. Ainsi, les IE dans le groupe intervention ont été tous classés comme importants : 1,25 pour les symptômes du SSPT, 1,05 pour la dépression et 1,17 pour l'échelle DSD. Dans le groupe liste d'attente, aucune modification n'a été notée.
A partir de ces données, les auteurs ont conclu que la thérapie cognitive est efficace dans le traitement des syndromes de stress post-traumatique lié au terrorisme et aux conflits civils. Ces résultats doivent être pris en considération par les acteurs du système de soins en France, en témoignent l'attentat terroriste du 3 décembre 1996 (Station Port-Royal du RER B) et plus récemment en novembre 2005 les émeutes dans les banlieues.
Dr Khodor Chatila