
Paris, le mercredi 26 mai 2010 – Une semaine après l’annonce du soutien de Roselyne Bachelot à la proposition de loi du député Yves Bur visant à restreindre l’obligation d’adhérer à l’Ordre infirmier aux seules professionnelles libérales, les réactions continuent d’abonder. Si les déclarations des uns et des autres apparaissent le plus souvent tranchées, oscillant entre l’indignation des infirmières libérales et le cri de victoire des syndicats représentant les salariés, l’organisation Convergence (syndicat de professionnelles libérales) fait entendre une voix un peu différente. Il s’interroge en effet clairement sur la part de responsabilité de la direction de l’Ordre dans la situation actuelle.
700 mètres carrés de bureau pour s’isoler de la profession infirmière
A la tête d’une instance dont la légitimité était de toute part interrogée, la direction nationale de l’Ordre n’a pas fait preuve de la maturité politique qui lui aurait permis de créer un consensus au sein de la profession, observe Marcel Affergan, président de Convergence Infirmière. Son communiqué parle ainsi de « positions suicidaires », d’une « surdité » constante et d’un entêtement contre-productif. Le syndicat rappelle qu’il s’est félicité de la création de l’Ordre qu’il a longtemps appelé de ses vœux, mais son président, lui-même élu ordinal, ne peut que déplorer le « gâchis » obtenu aujourd’hui. Pour l’organisation, l’Ordre aurait dû entendre les conseils répétés par le ministère de la Santé et la Direction hospitalière de l’organisation des soins (DHOS) concernant le montant de la cotisation, plutôt que de taxer ces interventions d’ingérence insupportable. Convergence ne peut comprendre que le conseil national ait préféré maintenir la nécessité d’une « organisation structurelle fastueuse » (s’appuyant notamment sur 700 mètres carrés de bureau à Paris ou encore les services d’un conseil d’audit) plutôt que d’entendre les appels à la raison qui émanaient de toutes parts et qui se faisaient même (difficilement) entendre en son sein. Jamais, en effet, la direction de l’Ordre n’a semblé prête à prendre acte des dissensions suscitées par ses décisions et sa mise en place et la réponse qu’elle a opposée à Roselyne Bachelot confirme cet aveuglement. Elle se contente en effet de précisions techniques et n’évoque nullement les causes possibles de la situation actuelle.
Retour en arrière ?
Non contente d’imposer plutôt que de discuter, l’Ordre n’aurait également pas réussi à apporter la preuve de son utilité. Convergence Infirmière note en effet qu’il a « décidé seul (…) d’un code de déontologie déjà poussiéreux et aveugle », largement inspiré de celui des médecins, alors même que ces derniers réfléchissent à sa refonte. Dès lors, analyse le syndicat d’infirmières libérales, la prise de position du ministre de la Santé semblait « inévitable ». Pour autant, le syndicat ne manque pas de s’interroger sur la pertinence d’une instance ordinale qui ne représenterait qu’une minorité de la profession. Aussi, en marge de son communiqué, le président du syndicat n’hésite pas à évoquer la possibilité d’un retour en arrière, avec la mise en place d’une structure intermédiaire qui permettrait un avènement plus serein dans quelques années d’une véritable institution ordinale reconnue et souhaitée par tous.
La fin des Ordres ?
Ce scénario pourrait ne pas être celui qui l’emportera, à l’heure où les déclarations de Roselyne Bachelot sont aujourd’hui utilisées par les centrales syndicales pour exiger une disparition de tous les Ordres professionnels. Sept syndicats de salariés appellent d’ailleurs, dans un communiqué diffusé hier, les masseurs kinésithérapeutes, les pédicures-podologues et toutes les autres professions paramédicales « ordrées » à « poursuivre le boycott de l’inscription et du paiement de la cotisation ».
Aurélie Haroche