Paris, le jeudi 14 avril 2011 – Le deuxième round de négociations destinées à élaborer une nouvelle convention entre l’Assurance maladie et les médecins libéraux ce jeudi 14 avril devrait être l’occasion d’entrer dans le vif du sujet. La question des déserts médicaux doit en effet être aujourd’hui au cœur des discussions. C’est sans doute le cœur léger que les syndicats aborderont cette séance au lendemain de l’abrogation par l’Assemblée nationale de la taxe Bachelot. Ce dispositif instauré par la loi Hôpital patient santé territoire (HPST) prévoyait si toutes les mesures incitatives se révélaient sans succès de sanctionner financièrement les praticiens des zones surdenses refusant d’exercer ponctuellement dans les zones sous dotées. Ce projet avait suscité une levée de boucliers chez certains syndicats et notamment la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) qui se félicite aujourd’hui de son abandon définitif. Les organisations syndicales le plus souvent très hostiles à toute mesure coercitive pourront également se rengorger des paroles du ministre de la Santé, Xavier Bertrand qui hier à la tribune a claironné : « Quand on nous dit qu’un peu de régulation et de coercition ne feront de mal à personne, et cela fera du bien aux patients… mais attendez… vous ne faites pas le bonheur des gens malgré eux. Vous ne prévoyez pas un système de santé sans les professionnels de santé ».
Où l’on pense de nouveau aux retraités !
Pas de mesures contraignantes au programme donc, dont les bénéfices d’ailleurs paraissent discutables si l’on se réfère aux exemples étrangers et si l’on rappelle que l’installation en libéral séduit déjà très peu les carabins. Certes, mais quelles solutions alternatives, prometteuses d’efficacité, seront proposées ? Faut-il prendre au sérieux la suggestion du secrétaire d’Etat à la santé, Nora Berra, qui la semaine dernière a proposé « d’inciter les médecins retraités à poursuivre leur activité, en particulier dans les zones qui manquent de médecins ». L’idée fera en tout cas sourire ceux qui se souviennent qu’il fut un temps où l’on pressait les praticiens de prendre leur retraite !
Un très léger mieux très coûteux
Au-delà de cet appel aux plus expérimentés, les incitations financières devraient une nouvelle fois être étudiées. Leur attrait apparaît cependant devoir être fortement nuancé à la faveur de données récemment présentées. Nora Berra, elle-même, admettait la semaine dernière que sur les 400 bourses proposées aux étudiants s’engageant à s’installer au début de leur carrière dans les localités les moins bien pourvues, seules 200 ont été attribuées. Le secrétaire d’Etat veut y voir la méconnaissance du dispositif. Mais d’autres éléments suggèrent que l’argent n’est peut être pas l’unique nerf de la guerre. Aujourd’hui, en effet, l’Assurance maladie présentera aux syndicats un document révélant que la majoration des honoraires de 20 % attribuée depuis 2007 aux médecins généralistes exerçant en cabinets de groupe dans les zones déficitaires n’a eu qu’un effet très modéré. On a compté dans les 4 000 communes concernées, 50 installations supplémentaires en quatre ans. « Même si les ordres de grandeur restent modestes, il s’agit d’une inflexion par rapport à la période précédente » tente de positiver l’Assurance maladie. Elle ne peut cependant constater que pour obtenir un tel résultat, les sommes engagées auront été très élevées : 19,7 millions d’euros ! Déjà, en novembre dernier, le Collectif interaasociatif sur la santé (CISS), la Fédération nationale des accidentés du travail (FNATH) et l’Union nationale des associations familiales (UNAF) déplorait qu’en dépit de ce dispositif, dans dix-sept secteurs concernés sur vingt-huit l’appliquant, les effectifs médicaux continuaient à diminuer.
Aurélie Haroche