L'homme de la semaine : Blade runner

Pretoria, le samedi 7 juillet 2012 – Le 20e siècle venait de naître et il fallait pour Georges que ce fut celui de l'audace. Le rêve olympique venait de renaître et Georges Eyser voulait y prendre part de toute son âme, de tout son corps. Unijambiste, le gymnaste obtint de participer aux jeux Olympiques de St. Louis de 1904 où son handicap ne l'empêcha pas de concurrencer très sérieusement les athlètes "valides" en décrochant trois médailles d'or, deux d'argent et une de bronze. Cent ans plus tard, Oscar Pistorius, 26 ans, né avec une aplasie du péroné et une ectrodactylie (absence congénitale d’un ou de plusieurs doigts), souhaite lui aussi participer à la compétition auprès des athlètes valides. Amputé dés l'âge de 11 mois en dessous des deux chevilles, ce sud-africain était sur les stades dès le plus jeune âge : rugby, water polo et surtout athlétisme auquel il se consacre exclusivement désormais. Après avoir décroché une médaille d’or sur 200 mètres aux jeux paralympiques d’Athènes en 2004, il vise depuis un nouvel objectif : les compétitions d’athlètes valides. Ses performances le confortent dans cette aspiration : les temps qu’il réalise aux 400 mètres avoisinent ceux des plus grands coureurs.

Querelle d’experts

Mais les instances internationales ne vont longtemps pas l’entendre de cette oreille là. En 2008, un rapport du professeur allemand Peter Brüggemann (Université du Sport de Cologne) commandé par la Fédération internationale d’athlétisme conclue que les prothèses de fibre de carbone portées par Oscar Pistorius (comme par de nombreux autres athlètes handicapés) l’avantageraient sur les concurrents valides. Position totalement désavouée par le tribunal arbitral du sport quelques mois plus tard, sur la base de mesures réalisées par des chercheurs américains, tandis que d’autres études iront plus tard dans le sens du professeur Brüggemann. En tout état de cause, pour la participation aux Jeux Olympiques de Pékin, c’est trop tard.

Des prothèses pas si handicapantes ?

L’idée selon laquelle ses prothèses conféreraient un avantage à Oscar Pistorius a toujours été dénoncée par le jeune athlète et ses proches. Pour expliquer ses performances, outre son talent, ils mettent plus certainement en avant le fait qu’il soit un des rares athlètes handicapés à être amputés des deux jambes ce qui lui « offre » une bonne symétrie dans la course. Par ailleurs, la précocité de son amputation lui a permis de s’adapter plus facilement à ses prothèses. En outre, s’il est certain que la « fatigabilité » notamment musculaire (et pour cause) d’un coureur équipé de prothèses est sans doute moindre, cet appareillage est certainement un frein au démarrage et dans les virages. 

« Véritable honneur »

Autant de discussions qui en tout état de cause n’ont pas empêché Oscar Pistorius de demeurer en piste et d’améliorer ses performances. Aux Mondiaux d’athlétisme de 2011 organisés à Daegu (Corée du Sud), il améliore son record personnel aux 400 mètres en les parcourant en 45 secondes et sept centièmes. S’il est éliminé en demi-finale et si son équipe de relais remporte sans lui la place de vice-champion du monde, il est néanmoins médaillé pour sa participation en série. Il devient ainsi le premier athlète handisport médaillé lors d’un championnat du monde pour athlètes valides. Une première qui en augurait une autre. Ce 4 juillet, Oscar Pistorius a appris qu’il était « sélectionné pour représenter l’Afrique du Sud sur le 400 mètres individuel et le relais quatre fois 400 mètres. Une chance qu’il qualifie de « véritable honneur ».

Aurélie Haroche

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