L'hypothèse d'une recrudescence des maladies auto-immunes (MAI)
avec les progrès de l'hygiène a été avancée depuis longtemps. Elle
pourrait être le fait d'une moindre endémie parasitaire et
notamment d'une plus faible exposition aux helminthiases.
Lors de ce 8ème congrès sur l'auto-immunité, une session
plénière et plusieurs abstracts ont été consacrés à ce sujet.
En clinique humaine, M. Bowmaker rapporte l'observation d'un malade
de 33 ans porteur d' une sclérose en plaques avec infestation par
Nécator americanicus suivie de l'absence de poussées et d'une
amélioration des lésions en imagerie (1). J. Lawrence, quant à lui,
s'est attaché à préciser les conditions d'utilisation de ce
parasite ainsi que de Trichuris trichura dans les MAI et maladies
atopiques et à quantifier les doses requises, les délais et les
taux de réponse (2).
Ces données cliniques, encore très parcellaires et anecdotiques, sont étayées par plusieurs travaux expérimentaux présentés lors de ce congrès. Dans une population de souris immunodéficientes avec colite inflammatoire, A. Metwali et collaborateurs montrent que la colonisation digestive par une helminthe (Heligosomoides pb) entraîne une amélioration significative de l'inflammation intestinale parallèlement à l'inhibition de la fonction TH17 et d'une modification de la balance TH17/Treg/TH2 (3). W. Harnett a, pour sa part, étudié l'effet de ES 62 qui est une des protéines principales sécrétées par un nématode (Acanthocheilonema viteae). L'ES62 module les voies de transcription de la réponse immunitaire via différentes enzymes, conduisant à de nombreux effets anti-inflammatoires dont l'inhibition de la dégranulation mastocytaire, la régulation de la prolifération lymphocytaire B et l'inhibition de la production de cytokines pro inflammatoires par les cellules dendritiques et les macrophages. Dans un modèle expérimental d'arthrite induite par le collagène, cet auteur fait la preuve d'un blocage de l'inflammation articulaire par le biais d'une action sur les cellules sécrétant l' IL17 (4).
Au plan thérapeutique, selon A. Loukas, le recours à Necator americanus serait le plus adapté pour les raisons suivantes : un profil de sécurité très satisfaisant, aussi bien en expérimentation qu'en clinique humaine, une infestation digestive persistante et enfin des données épidémiologiques fiables attestant du rôle bénéfique de cette helminthe dans la réduction des MAI. Il confirme l'isolement de 2 protéines sécrétées ou excrétées par le parasite qui, dans des modèles expérimentaux, protègent des souris d'une inflammation digestive ou d'une obstruction respiratoire (5).
Ainsi les helminthes pourraient non seulement avoir un rôle protecteur dans la survenue des MAI mais aussi, peut être un jour, avoir une place en thérapeutique.
Dr Pierre Margent