
Paris, le samedi 22 novembre 2013 – L’art n’est souvent affaire que d’imitation. Il n’est que quelques ingénus pour croire que le génie et l’originalité vont forcément de pair. Cependant, en nos époques modernes, certains ont parfois poussé ce principe à l’extrême et le résultat n’est pas toujours génial. Fonzy est une comédie mettant en scène un sympathique quadragénaire, plutôt paumé, qui découvre que ses dons de sperme à répétition ont fait de lui le père de 533 enfants dont 142 souhaitent le rencontrer. Cela vous rappelle quelque chose ? C’est normal le scénario de ce film d’Isabelle Dorval dont le personnage principal est campé par son compagnon José Garcia n’est autre que le remake parfaitement identique de « Starbuck », une comédie québécoise qui avait ravi les cinéphiles l’année dernière. Aussi, Fonzy dont les sketchs ne sont que des répétitions de l’original ne vaut que par la présence de son acteur principal.
Revoir
Un étrange goût de « déjà vu » s’impose également dans la série « Nurse Jackie » actuellement diffusée le jeudi soir sur Canal +. C’est dans un service d’urgences à l’activité frénétique qu’officie Jackie, infirmière, qui peine à concilier vie professionnelle et vie personnelle et qui partage au fil des épisodes les souffrances physiques et psychiques de ses patients. Vous vous croyez dans un spin off d’Urgences ? Pas tout à fait puisque Jackie consomme pour faire taire ses propres douleurs physiques de la Vicodin. Et si finalement nous étions face à un Docteur House au féminin ? Plutôt que du copier coller, la série pourrait être du copier croiser !
Relire
Dans ce méli mélo de reproduction, ce ne sont pas seulement les œuvres des autres que l’on imite, mais parfois les siennes propres. L’un des écrivains américains préféré des Français, Douglas Kennedy reprend dans son dernier roman « Cinq jours » plusieurs des recettes qu’il a déjà appliquées avec succès dans ses précédents opus : il n’hésite pas à se mettre dans la peau d’une femme (comme il l’avait fait dans « La Poursuite du bonheur »), il s’intéresse au changement de vie (avec moins de fougue que dans « L’homme qui voulait vivre sa vie ») et il nous plonge dans l’âme de son personnage en proie aux tourments existentiels et amoureux (comme toujours !). Le résultat est un peu moins entraînant que dans la plupart de ses romans précédents. On trouve cependant une différence, Laura, son héroïne est technicienne dans un cabinet de radiologie et rare ont été les personnages de Douglas Kennedy à être ainsi immergés dans le monde médical. Cela lui permet de confronter ses propres interrogations à la souffrance qu’elle côtoie quotidiennement.
Réentendre
On pourrait redouter qu’un livre sur le handicap de son enfant, la surdité, ne soit à son tour qu’une longue répétition des tourments déjà lus dans les récits d’autres parents d’enfants malades. Le roman de Bertrand Leclair, « Malentendus » publié chez Actes Sud et qui vient d’être salué par la huitième édition du Prix littéraire Handi Livres échappe à cette longue série de « copier coller ». Il propose au contraire une réflexion inattendue sur la longue histoire de la prise en charge des sourds, sur cette volonté forcenée de les « réparer ». Il évoque également comment au sein d’une famille touchée par le handicap, les « malentendus » ne sont pas d’abord liés à ce dernier, mais comme dans toutes les autres familles, nourri par les secrets, les non dits et les anicroches du quotidien. Comme si elles n’étaient qu’un copier coller de toutes les autres familles.
Aurélie Haroche