Violences contre les médecins : jamais autant d’incidents signalés au Conseil de l’Ordre

Paris, le mercredi 2 avril 2014 – Le Conseil national de l’Ordre a mis en place en 2003 un Observatoire dédié à la sécurité des médecins, destiné à recevoir les déclarations d’incidents de ces derniers. Cette structure n’avait jamais reçu autant de signalements qu’en 2013 : 925 contre 798 en 2012 ; un niveau qui n’avait été approché qu’en 2010 (année au cours de laquelle 920 faits avaient été rapportés). Il est toujours difficile de tirer des conclusions parfaitement significatives de ces chiffres en raison d’importants biais de déclaration. D’abord, comme le rappelle l’Ordre, ils ne sont que « la face immergée » de la situation, puisqu’un très grand nombre de praticiens omettent de signaler les faits de violence qu’ils ont subis ou dont ils ont été témoins dans le cadre de leur exercice, par ignorance du dispositif souvent, mais également par refus de dénoncer un malade. Ensuite, l’année 2013 a été marquée par une nouvelle campagne d’incitation à la déclaration, qui a donc pu susciter, de manière artificielle,  une progression plus marquée.

Exaspération des patients à leur comble et indulgence moindre des médecins

Néanmoins, le Conseil de l’Ordre observe une « exaspération » croissante des patients, comme l’explique le responsable de l’Observatoire, le docteur Bernard Le Douarin. Ce phénomène s’observe par exemple dans la hausse des incivilités, telles les menaces et les insultes, qui représentent désormais 69 % des faits signalés, contre 66 % l’année dernière. Cette évolution pourrait résulter de la progression cumulée de ce type de faits et du refus croissant des praticiens de les supporter sans mot dire. Parallèlement, les agressions physiques connaissent une très légère diminution (passant de 12 à 11 %).

Les insultes et menaces seraient liées dans un tiers des cas au mécontentement du patient quant à sa prise en charge, tandis que la colère face au refus de prescription de médicaments ou d’un arrêt de travail favorise le manque de civilité, de même que le temps d’attente jugé excessif. Ces différents motifs expliquent que les médecins généralistes soient les plus exposés : ils constituent 58 % des médecins agressés (alors qu’ils représentant 54 % de la population médicale). Chez les spécialistes, ce sont les ophtalmologistes, les psychiatres, les gynécologues et les pédiatres qui sont les plus exposés, soit des spécialités marquées par des difficultés d’accès ou confrontées à des populations "particulières". Soulignons par ailleurs que le médecin est la victime dans neuf cas sur dix, et le patient l’agresseur dans la moitié des cas.

Plus de signalements, mais moins de plaintes !

Signalant plus fréquemment les méfaits dont ils sont les victimes, les médecins ne se montrent cependant pas plus enclins à porter plainte. Ainsi, moins d’un tiers des faits signalés à l’Ordre a fait l’objet d’une plainte en 2013 (soit une baisse de 7 points depuis 2010) et 14 % d’une main courante (un élément qui pourrait d('ailleurs être en faveur d’un biais de déclaration dans la hausse constatée par l’Observatoire ou d’un manque de temps accru des praticiens). Pourtant, un protocole national de sécurité a été adopté en 2011 qui suppose entre autres la « mise en place d’un numéro d’accès direct à la cellule de sécurité départementale uniquement destiné aux médecins » et qui permet le dépôt de plainte depuis son cabinet. Ce dispositif serait effectif dans 71 départements aujourd’hui selon l’Ordre qui signale également qu’il a mis en place plusieurs outils à l’intention des médecins.

Commentant les chiffres de l’Ordre, la Confédération des syndicats médicaux français estime indispensable de nouvelles discussions sur le sujet avec le nouveau ministre de l’Intérieur (Bernard Cazeneuve) alors que des rencontres sur ce thème ont déjà eu lieu récemment avec un certain Manuel Valls.

Aurélie Haroche

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