Si tu t’imagines…

Paris, le samedi 20 juin 2014 – Molière avait dépeint les malades et les médecins imaginaires. Les praticiens qui se cachent dans les romans que vous pourriez dévorer cet été sur la plage seraient pour leur part, plutôt difficiles à imaginer. Que penseriez-vous d’une femme ayant revêtu l’habit de médecin au Moyen Age ? Elle pourrait avoir les traits de Caterina, l’héroïne de « La Rebelle », roman de l’italienne Valeria Montaldi, qui vient de recevoir à Chartres Le Prix Fulbert qui récompense des ouvrages ayant pour décor principal le Moyen Age. Ce livre palpitant nous invite à suivre les péripéties médicales et amoureuses de Caterina, qui sous le règne de Saint Louis exerce la médecine à Paris, à l’Hôtel Dieu, participant à des dissections de cadavres interdites par l’Eglise. Lorsque le scandale est découvert, Caterina est désignée comme la seule coupable par ses confrères, ce qui la contraint à fuir en Italie où elle continue à pratiquer son art. Inimaginable ? Pas si sûr, le roman de Valeria Montaldi s’appuie en effet sur des documents historiques authentiques, car le Moyen Age, compta, contrairement à ce que beaucoup peuvent imaginer, plusieurs femmes médecins !

Dans un tableau de Jérôme Bosch

Avec un peu d’imagination, vous pourrez quitter la cour de Saint Louis et vous retrouver trois siècles plus tard au Pays Bas. C’est ici que se déroule le roman « L’Ange Sanglant » de Claude Merle. Que s’est-il passé à Hertogenbosch où une jeune fille est découverte sauvagement assassinée, dans une mise en scène macabre qui rappelle étrangement les tableaux du maître Jérôme Bosch ? L’enquête est confiée à un bailli qui découvre que la victime est la servante de Jacob Dagmar, un chirurgien et alchimiste. Quelle est la responsabilité de ce brillant praticien dans ce crime tout à la fois abominable et sublime ? Peut-on imaginer qu’un médecin puisse commettre d’aussi atroces méfaits ? Pour savoir ce qui a germé dans l’imagination de l’écrivain, vous n’hésiterez pas à aller à la rencontre de l’Ange Sanglant.

Dans un tableau d’Edward Hopper

Difficile d’imaginer un médecin sous les traits d’un tueur, mais également sous ceux d’un accro à la morphine. C’est pourtant le cas de Wild l’un des principaux personnages d’un autre roman policier haletant offert par la plume de Chris Womerseley, auteur australien très remarqué depuis « Les Affligés ». Dans « La mauvaise pente », il mêle le destin de Lee un petit voyou d’une vingtaine d’années blessé lors d’un mauvais braquage par une balle dans le ventre et Wild, un médecin toxicomane qui fuit un procès pour erreur médicale. La cavale de ces deux individus si différents est l’occasion tout à la fois de rebondissement inattendus mais également d’une dissertation sur les échanges humains.

Dans un tableau de Georges Orwell

Et qu’imaginer pour l’avenir ? Que sera devenu le médecin ? Une application pour smartphone comme les autres, qui sait. C’est l’avenir dessiné dans le roman « Prescription mortelle » de l’américain Robin Cook. Dans un futur par si éloigné, les patients atteints de maladie chronique peuvent être suivis 24h sur 24 par un logiciel répondant au nom de « iDoc ». Mais bientôt, plusieurs patients s’étant abonnés à ce programme meurent prématurément. George Wilson, radiologue, dont la compagne est l’une de ces victimes décide de s’intéresser de plus près à ces cas, au risque de s’attaquer à la puissante compagnie d’assurance Amalgamated Healthcare à l’origine de l’application « iDoc ». Ce thriller politico médical permet d’aborder la question de l’organisation des soins aux Etats-Unis sous un angle différent et ludique.

Et de comprendre qu’il est difficile d’imaginer un monde sans médecin.

Romans:
« La Rebelle », de Valeria Montaldi, éditions Pygmalion, 456 pages, 21,90 euros
« L’Ange Sanglant », de Claude Merle, MA éditions, 240 pages, 17,90 euros
« La mauvaise pente », de Chris Womerseley, Albin Michel, 352 pages, 20 euros
« Prescription mortelle », de Robin Cook, Albin Michel, 476 pages, 22 euros

Aurélie Haroche