Sacrée dentisterie

Une mésiodens bien visible sur la Sybille de Delphes par Michel Ange (Chapelle Sixtine)
Rome, le samedi 8 novembre 2014- Si la majorité d'entre nous, se contente face à une œuvre d'art de ressentir une émotion esthétique, certains font profession de scruter inlassablement tableaux et sculptures célèbres à la recherche de symboles ou de signes cachés. C'est ainsi, on le sait, que la Joconde a donné lieu à de multiples interprétations et que pour certains Mona Lisa n'était pas comme on le pensait généralement Lisa Maria Gherardini fille de Francesco di Bartolomeo di Zanobi del Giocondo, mais (et avec de bons arguments) un homme. En quelque sorte un très discret (et prudent) coming out de Léonard.

Théologie ou anomalie  

Marco Bussagli, un historien d'art italien s'est, lui, attaqué à Michel Ange. En observant pour la nième fois les œuvres du maître florentin, il a constaté sur plusieurs visages peints, une caractéristique anatomique relativement rare, la présence d'une mésiodens. Il s'agit en l'espèce d'une incisive supérieure surnuméraire en situation médiane.

Allant plus loin Bussagli a réexaminé le visage du Christ sur la célébrissime Pietà exposée dans la basilique Saint Pierre et il a décelé entre ses lèvres (en zoomant sur une photographie prise au dessus de la statue) une autre mésiodens.

Pour expliquer cette 33ème dent du Christ, dans un livre sur "Les dents de Michel Ange" Marco Bussagli examine diverses hypothèses. Il écarte d'emblée une erreur de Michel Ange, dont la rigueur anatomique était légendaire. Il repousse rapidement une assimilation entre le Christ et le mal (cette hyperdontie ayant longtemps était considérée comme un signe maléfique), le Maître étant renommé pour sa foi ardente. Et il retient une explication théologique complexe, aussi mystérieuse que la Trinité, la mésiodens étant, selon lui, en substance, le symbole de notre incapacité à comprendre la Rédemption.
Plus prosaïquement n'est-il pas envisageable de penser, si l'on admet la présence de cette 33ème dent dans la bouche du Christ de la Piéta (que le profane ne peut plus apercevoir de près la statue étant protégée par une vitre blindée depuis un attentat commis en 1972 !), que le modèle utilisé par Michel Ange, pour la Pietà et pour certaines peintures, avait bien une mésiodens comme 0,15 à 1,9 % de la population selon les séries... et ce avant une intervention d'orthodontie peu pratiquée à la renaissance.

NB: Le syndrome de Christ-Siemens-Touraine ou Dysplasie ectodermique hypohidrotique liée à l'X qui associe une anomalie de la chevelure, une oligodontie et une hypohydrose, n'a pour seul rapport avec la mésiodens du Christ de Michel Ange qu'une très curieuse homonymie !


Dr Céline Dupin

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