Un traitement de champ pour la kératose actinique

Lors du congrès de l’EADV, une « Agora des kératose actinique » a permis de faire le point sur la kératose actinique et sur la place de Picato gel (mébutate d’ingénol), nouveau venu dans sa prise en charge. Le Pr B. Cribiere et le Pr N. Basset-Seguin ont « campé le décor », puis le Pr M-A. Richard, le Dr J-C.Claudel, le Pr B. Dréno et le Dr J-M. Amici ont discuté de cas pratiques.

La kératose actinique (KA) est une lésion cutanée, de rugosité palpable, siégeant sur des zones exposées au soleil. Elle est caractérisée par la présence de kératinocytes atypiques dans les couches profondes de l’épiderme et par des anomalies de maturation de l’épiderme superficiel. Cette lésion est liée à une altération de l’immunité au cours du vieillissement. Une KA peut évoluer selon trois modalités : disparition spontanée, persistance, ou progression vers un carcinome épidermoïde. Des lésions de KA nombreuses et étendues témoignent d’un champ de cancérisation: zone péri-tumorale comportant des anomalies infracliniques, multifocales, pouvant faire le lit de récidives ou de lésions néoplasiques. Dans ce cas, il est intéressant d’agir sur le champ de cancérisation avec un traitement topique.

Picato gel est un « traitement de champ » qui induit une mort cellulaire localisée au niveau de la lésion de KA et stimule une réponse inflammatoire avec infiltration de cellules immunocompétentes. Suite à son évaluation dans 4 études versus placebo, Picato gel (mébutate d’ingénol) a obtenu l’indication pour le traitement cutané des KA non hyperkératosiques, non hypertrophiques (AMM européenne, janvier 2013). Il est remboursé à 30 % par la Sécurité sociale. En attendant des données comparatives et un certain recul compte tenu des réactions locales, la HAS réserve Picato aux contre-indications des traitements de 1ère intention tels que la crytothérapie (1). Depuis sa mise à disposition en février 2014 en France, les cliniciens apprécient Picato pour sa simplicité d’utilisation et le fait de ne pas provoquer d’effet systémique. Il ne nécessite que 2 ou 3 jours de traitement (contre 4 à 12 semaines pour les autres topiques). Les réactions cutanées locales, du même type que celles des autres traitements topiques de la KA, atteignent un pic au 3e ou 4e jour et régressent en 2 semaines sur le visage et en 3 à 4 semaines sur le corps. Il est important de bien expliquer au patient le risque de survenue de ces réactions locales qui sont liées à l’efficacité immunitaire du produit. On pourra optimiser la tolérance en appliquant Picato gel le soir, environ 30 minutes après le bain ou la douche, et une crème cicatrisante le matin.

Récemment, l’étude FIELD versus placebo (n = 329) a montré l’intérêt d’appliquer pendant 3 jours Picato 3 semaines après une cryothérapie pour traiter des KA visibles et discrètes sur une zone (25 cm2) du visage ou du cuir chevelu. Ce protocole a amélioré significativement les bénéfices de la cryothérapie à 3 mois et 1 an (taux de patients exempts de KA, disparition partielle des lésions et prévention de nouvelles lésions dans la zone traitée). Un an après le traitement, il y avait 2 cas de carcinome épidermoïde dans le groupe placebo et aucun dans le groupe Picato.

Véronique Canac

Références
D’après le Symposium organisé par les laboratoires Leo. 23e congrès de l’EADV. Amsterdam. 8-12 octobre 2014.
1) HAS. Commission de la Transparence, avis du 26 juin 2013.
2) Berman B et coll.: Efficacy and safety of ingenol mebutate 0,015 % gel after cryosurgery of actinic keratosis: 12-month results. J Drugs Dermatol. 2014 Jun ; 13 (6) : 741-7.

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