
L’élaboration de recommandations de bonne pratique (RBP) sur la base d’études cliniques de haute qualité permet de proposer des standards de prise en charge et de statuer sur le remboursement des nouvelles molécules.
Les conflits d’intérêt financiers (CIF), dont on sait qu’ils peuvent affecter la présentation de l’information dans les revues médico-scientifiques, peuvent être de différents types et on considère que c’est lorsqu’un chercheur possède des actions d'une entreprise de l’industrie pharmaceutique, qu’il en est salarié ou intervenant régulier que ces CIF ont le plus d’influence (CIF majeurs).
Une équipe s’est intéressée à l’impact des CIF sur la conception et la publication des RBP en lien avec l’approbation des nouveaux anticancéreux.
Une influence globalement significative dans un contexte d’amélioration de la transparence
Au total 142 publications de RBP et de conférences de consensus parues entre janvier 2003 et octobre 2013 ont été analysées, dont 85 émanaient de sociétés savantes. Pour 98 d’entre elles (64,8 %) il y avait des liens d’intérêt pour au moins un auteur, lesquels sont signalés dans environ deux tiers des manuscrits (n = 66) ; dans 45 cas, les CIF sont majeurs.
Sans préjuger de la nature du CIF, on constate qu’en 2003 seuls 11 % des articles déclaraient les liens des auteurs alors que ceux-ci sont signalés dans 93 % des publications en 2013 (p<0,001).
En ce qui concerne l’influence des CIF sur l’approbation d’un anticancéreux dans les RBP, on note que 20 études sur les 31 qui soulignent l’intérêt d’un anticancéreux dès l’abstract sont rédigées par des auteurs ayant des CIF (dont 80 % pour le laboratoire qui développe l’anticancéreux). L’analyse statistique des données montre que les CIF sont significativement associés à l’approbation d’une nouvelle molécule anticancéreuse (p < 0,001), mais ce lien significatif n’est pas retrouvé avec les CIF majeurs. De même, l’inclination des auteurs à produire régulièrement des RBP approuvant de nouveaux anticancéreux semble liée à la présence pour ceux-ci de CIF.
Enfin, les RBP qui approuvent une nouvelle molécule anticancéreuse sont significativement plus rares (p=0,04) dans les revues qui ont adopté un politique stricte en matière de déclaration de conflits d’intérêts…
Cette étude suggère donc que les conflits d’intérêts majeurs « facilitent » ou accélèrent la mise sur le marché et l’approbation par les sociétés savantes de nouvelles molécules anticancéreuses. Cependant, les différentes politiques de transparence quant aux liens entre l’Industrie pharmaceutique et les professionnels de santé semblent porter leurs fruits puisque le nombre de liens non-déclarés a significativement diminué en dix ans.
Florian Slimano