
Paris, le lundi 29 décembre 2014 – Les syndicats de médecins libéraux ont réussi leur coup d’éclat : la réponse des généralistes et des spécialistes à leur appel à la fermeture des cabinets entre le 24 et le 31 décembre a été massive. Les deux principales organisations évoquaient la semaine dernière un taux de participation avoisinant les 80 % et tablent pour cette nouvelle semaine de grève pour une mobilisation semblable. Surtout, cette seconde période est marquée par l’entrée dans le mouvement des praticiens de SOS médecins, structure ayant annoncé à la mi novembre sa volonté de prendre part à la contestation. Les critiques des responsables de SOS médecins contre le projet de loi de santé sont multiples et rejoignent pour la plupart les inquiétudes des syndicats.
Les SOS médecins ont déjà expérimenté l’absurdité des décisions des ARS
Ils se mobilisent tout d’abord contre la généralisation du tiers payant, dont ils redoutent qu’elle ne crée « un environnement bureaucratique portant atteinte à l’exercice libéral de la médecine, alors que la dispense d’avance de frais est déjà largement utilisée au profit des personnes les plus démunies » peut-on lire dans un récent communiqué. Le pouvoir accru des Agences régionales de santé (ARS) est également fortement contesté. Depuis quelques années déjà, SOS médecins fait les frais de l’intervention de ces ARS dans l’organisation des soins. La structure donne comme exemple la fin du financement de la permanence de soins en nuit profonde (minuit-huit heures) dans quelques régions, ce qui oblige les personnes nécessitant une prise en charge de se rendre aux urgences. Une décision aberrante alors que l’engorgement de ces services est déjà continuellement dénoncé, tandis qu’elle s’avère également beaucoup plus coûteuse.
Réquisitions massives
Massivement en grève, le millier de médecins des SOS et leurs 64 structures devraient cependant demeurer opérationnels aujourd’hui : les réquisitions ayant été très nombreuses. La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) confirme elle aussi dans un communiqué publié aujourd’hui que les réquisitions n’ont pas manqué ce week-end. Cette situation témoigne de la volonté des pouvoirs publics de prévenir un fort engorgement des services d’urgences, alors que cette période de l’année est toujours marquée par de multiples épidémies (même si la grippe ne s’est pas encore installée).
La CSMF veut croire que le gouvernement a acheté le silence des urgentistes…
Difficile cependant de mesurer avec exactitude l’impact de la grève (ce qui permettrait également de mieux évaluer son ampleur par rapport aux traditionnelles fermetures de fin d’année). Du côté du ministère de la Santé, les commentaires sont aussi rares que laconiques. Le site se contente de rappeler aux Français la marche à suivre pour trouver un praticien. Les SAMU se montrent plus loquaces, mais leurs témoignages ne sont pas homogènes. On parle par exemple d’une « explosion des demandes de régulation » en Vendée ou dans l’Oise, tandis qu’à Paris ou à Dijon, la situation a été calme et bien maîtrisée. Qu’elles aient senti ou non des « coups de chaud » pour reprendre l’expression du patron du SAMU, François Braun, toutes les structures sont aujourd’hui dans « l’expectative ». L’entrée en grève de SOS médecins pourrait en effet changer la donne, bien que certains tablent parallèlement sur un essoufflement du mouvement du côté des médecins libéraux installés en cabinet. La CSMF fait en tout cas une lecture particulière de la difficulté de connaître la situation dans les services d’urgence. « Pour la première fois, comme par hasard, la presse ne se fait pas l’écho de la surcharge des urgences hospitalières pendant les fêtes, alors que c’est devenu un « marronnier ». Pourtant, les centres de régulation libérale font face à un afflux d’appel exceptionnel. De là à penser que le silence faisait partie de l’accord [entre les urgentistes et le ministère, ndrl]… » sous-entend le syndicat qui n’hésite pas une énième fois à attiser la guère public/privé.
Pas de rencontre avec le ministère de la Santé avant le 12 janvier
Une autre incertitude demeure : les suites qui seront données au mouvement. On le sait, plusieurs syndicats ont déjà signalé que le 31 décembre ne signerait pas la fin des actions. « Un mouvement ne s’arrête pas un jour J, si les réponses n’ont pas été apportées. Il peut se poursuivre sous de multiples formes » prévient par exemple le président de la CSMF, Jean-Paul Ortiz, tandis que MG France a déjà appelé à une nouvelle journée de fermeture des cabinets le 6 janvier.
Le ministère de son côté n’a pas prévu de revoir les belligérants avant le 12 !
Aurélie Haroche