Gazouiller contre le silence

Calgary, le samedi 10 janvier 2015 – Les réseaux sociaux ont inventé une nouvelle forme de charité. Depuis quelques mois, pour donner, il suffit parfois simplement d’aimer ou de tweeter. En pratique, une association se lance un défi : récolter un nombre impressionnant de mention « j’aime » sur Facebook ou de partage sur le réseau Twitter. En échange de chaque participation anonyme et sans frais des internautes, un sponsor accepte de verser une petite contribution qui en fonction du nombre de personnes mobilisées peut devenir très importante. Pour l’ensemble des acteurs, l’opération est souvent gagnante : la campagne de collecte se révèle très peu coûteuse, les « donateurs » de clics ont le sentiment d’une bonne action (sans aucun "sacrifice" financier) et les sponsors participent à une opération de charité, souvent bien perçue, une fois encore sans que la contribution ne soit insurmontable.

Un objectif inatteignable

L’un des avantages de ce système est également la possibilité pour tout un chacun de lancer son message de sensibilisation et ce sans aucune infrastructure. Telle a été l’ambition de Bret Rothery. Ce lycéen de 16 ans de Calgary au Canada a pu constater à quel point les troubles mentaux sont méconnus du grand public et font l’objet d’un lourd tabou. Ayant lui-même souffert de plusieurs épisodes dépressifs, Bret Rothery a voulu tout à la fois ouvrir le dialogue sur le sujet et récolter des fonds. Pour ce faire, il n’a pas hésité à mettre à contribution son établissement. Peu avant les vacances de Noël, il a présenté son projet aux responsables de la Crescent Heights High School dont il est l’élève. Son objectif : lancer sur Twitter une campagne visant à inciter à évoquer les troubles mentaux et renvoyant vers des liens donnant différentes données ainsi que des numéros à contacter. Pour mesurer l’efficacité de cette opération et récolter parallèlement des fonds, Breth Rothery propose à son lycée de verser 0,5 dollars pour chaque hashtag partagé. Jackie Chapman-Brown accepte de jouer le jeu, proposant de financer la campagne jusqu’à 500 dollars, songeant sans doute que 10 000 partages ne seraient jamais obtenus. Le contrat est passé et le nom de code trouvé : CHHS (pour Crescent Heights High School) Lets Talk.

Un défi sans bémol

Après le réveillon du Nouvel An, Breth Rothery soutenu par plusieurs camarades se lance à l’assaut. En huit heures, les 10 000 partages sont atteints ! Une réussite inespérée qui témoigne de la capacité de mobilisation de Breth Rothery mais aussi selon le jeune lycéen d’une profonde aspiration de voir cette question plus largement abordée. Surtout, cette si rapide mobilisation a attiré l’attention de nombreuses personnalités à Calgary et au-delà dans tout le pays, tant le hashtag a su rapidement s’imposer à la tête du Twitter canadien. Le maire de la ville, des élus et des personnalités engagées dans la lutte contre la discrimination des personnes atteintes de troubles mentaux ont manifesté leur intérêt. Et la surenchère n’a pas tardé, plusieurs personnes ou sociétés ont proposé à leur tour de financer la campagne. Après que 10 000 tweets supplémentaires furent rapidement comptabilisés, la compagnie de gaz et de pétrole CSV Midstream Solutions a offert de verser 5 000 dollars si 100 000 partages supplémentaires étaient obtenus avant ce week-end.

Un visibilité encore attendue en France

Cette très large mobilisation confirme la puissance des réseaux sociaux pour offrir une visibilité importante aux programmes de sensibilisation et aux collectes de don. Elle met également en évidence à quel point dans les pays anglo-saxons, des anonymes, des élus, des organisations militent pour offrir un nouveau regard sur les troubles mentaux. Cette initiative canadienne fait en effet écho à un récent programme lancé en Grande-Bretagne invitant ceux et celles qui souffrent de troubles mentaux ou qui prennent en charge un patient atteint de maladie mentale à être candidat au titre de "Héros de la santé mentale".

A quand en France ?

Aurélie Haroche

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