Conséquence logique de la récente recrudescence des cas de gale en France, plusieurs communications ont été consacrées à cette parasitose au cours des JDP 2014. L’une d’elles s’est même intéressée au signe cardinal de la maladie, le prurit, que nous croyons bien connaître mais dont, selon E Brenaut et coll. du CHU de Brest, nous ne saurions que peu de choses…
Et de fait, si l’étude des 19 patients inclus, de plus de 18 ans, confirme la prédominance nocturne du prurit (qui n’est pas spécifique de la gale), elle nous apprend ou souligne aussi qu’il est fréquemment accompagné d’autres symptômes : douleur (58 % des cas), sensation de chaleur (37 %) sueurs (37 %) mais aussi et surtout picotements (79 %), chatouillements (68 %), brûlures (74 %) peut-être liées à la présence locale du parasite. Stress, xérose, transpiration et contact avec l’eau chaude sont des facteurs aggravants.
Ces indications sémiologiques supplémentaires peuvent aider au
diagnostic qui est parfois difficile. V Pallure et O Dereure
signalent ainsi que chez 15 % des patients vus en Languedoc
Roussillon au cours de l’année écoulée pour une suspicion de gale
(ultérieurement confirmée) le tableau était non spécifique voire
très atypique : éruption prurigineuse chronique évoluant sur une
longue durée (jusqu’à 3 ans) sans notion systématique de prurit
familial, insensible à un traitement antiscabieux antérieur ;
localisations atypiques chez l’enfant : lésions eczématiformes
résistant aux dermocorticoïdes, lésions au niveau de la nuque,
dermites du siège, nodules du dos avec signe de Darier, pustuloses
palmoplantaires et aspects déroutants chez l’adulte notamment âgé :
manifestations suggérant une dermatite herpétiforme,
érythrodermies, eczémas craquelés, prurigos nodulaires, ecchymoses
, éruptions psoriasiformes, papulonodulaires diffuses,
dermographismes, dyshidroses palmaires
isolées…
Mais au-delà du diagnostic, la gale pose aussi et surtout le
problème des nombreux échecs thérapeutiques. Deux équipes se sont
penchées sur les raisons de cette faillite avec des résultats
quelque peu nuancés.
Dans l’une, menée sur 31 patients qui avaient présenté les premiers symptômes en moyenne 19 semaines auparavant, il apparaît que 84 % d’entre eux avaient eu au moins un traitement oral de gale et 74 % au moins un traitement local. La décontamination des sujets contacts avait été bien faite dans 58 % des cas et celle du linge dans 90 % des cas. Les auteurs estiment donc que les échecs thérapeutiques sont essentiellement liés au manque d’efficacité des traitements dont nous disposons et à une prise en charge synchrone médiocre des sujets contacts.
Une seconde étude a concerné un effectif plus important de 210 patients ayant été traités pour gale. La comparaison des victimes d’une récidive au cours des trois mois suivants et des sujets « guéris » de leur parasitose a permis de distinguer plusieurs facteurs significativement associés au risque d’échec thérapeutique : durée d’évolution de plus de 30 jours au moment du diagnostic (Odds ratio [OR] : 3,97), absence de traitement local (OR : 2,41), de seconde prise de traitement oral (OR : 10,2), d’une prise non à jeun (OR : 4,3), application de dermocorticoïdes (OR : 2,95), traitement du seul cas index (OR : 2,59), pas de consignes écrites pour la décontamination et la prophylaxie (OR : 5,82), enfants en bas âge au sein de la famille, gardés à l’extérieur (OR : 2,55), insuffisances dans la décontamination : pas d’acaricide utilisé pour le linge (OR ; 8,62), de traitement des canapés et fauteuils (OR : 5,89), des sièges de voiture (OR : 6,56) de la literie (OR : 4,16). L’analyse multivariée a confirmé le lien avec l’absence d’utilisation d’acaricide, de non traitement des sièges auto et l’application de dermocorticoïdes. Ceci démontre l’importance d’une seconde prise de traitement oral et du respect des règles de décontamination (ne pas oublier les sièges de voiture) pour la réussite du traitement de la gale.
Dans les deux études, il a par contre été observé que les mauvaises
conditions socio-économiques n’étaient pas un frein à la prise en
charge de cette parasitose.
Dr Marie-Line Barbet