
Berlin, le mardi 24 février 2015 – L’Allemagne et notamment Berlin sont touchés par une importante épidémie de rougeole depuis le mois d’octobre dont l’origine est un groupe de demandeurs d’asiles venant de Serbie et de Bosnie-Herzégovine, deux pays également frappés par une résurgence de la rougeole. Ainsi, 570 cas ont été recensés dans la capitale allemande depuis cet autonome, contre moins de 130 par an les années précédentes. La propagation de la maladie est favorisée par une couverture vaccinale non optimale. Si celle-ci a très favorablement progressé chez les enfants de moins de 6 ans (atteignant en 2012, 92,4 % en ne recensant que ceux ayant reçu les deux injections), elle demeure critique chez les adolescents et jeunes adultes ; le début des années 2000 ayant été marqué par une chute vertigineuse de la pratique vaccinale (qui est descendu jusqu’à 33 %).
Décès d’un enfant non vacciné
Cette situation a nourri un débat sur l’opportunité de rendre obligatoire la vaccination contre la rougeole. Le gouvernement avait même suggéré d’imposer cette vaccination pour permettre l’entrée à la crèche, mais les Verts et l’extrême gauche avaient repoussé le projet, estimant que la contrainte pourrait se révéler contre-productive et défendant le libre choix. Cette position a été partagée par certains professionnels de santé, estimant difficile d’un point de vue organisationnel, la mise en œuvre d’une telle mesure. Cependant, le décès annoncé hier d’un enfant de 18 mois pourrait relancer la polémique. Le nourrisson qui était vacciné contre plusieurs autres pathologies, n’avait pas été immunisé contre la rougeole sans que l’on sache si cette absence était liée à un retard (la première injection doit de manière optimale être réalisée à l’âge de un an, mais certains parents ne respectent pas toujours à la lettre ce calendrier) ou à un refus de la famille. Quoi qu’il en soit, la mort de ce nourrisson a été commentée avec colère par le ministre régional de la Santé. Appelant la population à vérifier la mise à jour de ses vaccinations, Hermann Gröhe a fustigé le choix de « certains irresponsables opposés aux vaccins qui sèment une peur irrationnelle ». Alors que des vérifications plus fréquentes devraient avoir lieu dans les prochaines semaines, Herman Gröhe a encore ajouté : « Celui qui refuse de vacciner son enfant ne met pas seulement cet enfant en danger, mais d’autres également ». Si l’idée de rendre l’immunisation contre la rougeole obligatoire n’est pas encore à l’ordre du jour, le porte-parole du ministère régional de la Santé a souligné que « d’autres mesures » pourraient être prises, si aucune amélioration n’était rapidement observée.
Une argumentation politique non performante ?
L’Allemagne, on le sait, n’est pas seule à être en proie à une résurgence de la rougeole, liée à une immunisation insuffisante de la population. La France a ces dernières années été confrontée à une flambée du nombre de cas. De même, le Canada et les Etats-Unis font actuellement face à des épidémies qui inquiètent les autorités sanitaires. Face au discours anti vaccination, rappelant à l’envi le prétendu risque d’autisme associé à l’immunisation contre la rougeole (pourtant démenti par toutes les études scientifiques) et au développement de vaccins s’affichant comme « homéopathiques », les responsables politiques doivent monter au créneau. Comme en Allemagne, les tenants des thèses anti vaccination sont partout qualifiés « d’irresponsables », sans que l’on sache si cette formulation permet d’atteindre ceux qui pourraient être séduits par ces discours, qui ont tôt fait de renvoyer l’accusation à l’envoyeur.
Aurélie Haroche