
Les sepsis sévères sont un motif fréquent d'admission en unité de soins intensifs (USI). L’intensité des signes cliniques (température corporelle, fréquence cardiaque . . .) constituant la réponse systémique de l'hôte reflètent la gravité d’une infection. Ces paramètres, codifiés il y a une vingtaine d’années, sont connus comme les critères du « syndrome de réponse inflammatoire systémique » ou SIRS. Le nombre de critères de SIRS les 24 premières heures permet ainsi de distinguer des degrés dans la sévérité des infections. Selon cette approche, le diagnostic de sepsis sévère nécessite une infection suspectée ou prouvée, une défaillance d’organes et la présencede 2 critères de SIRS, au moins. Actuellement, certains auteurs remettent en cause l’intérêt pronostique de cette définition. La réponse clinique, non spécifique, du patient peut en effet être modulée par de nombreux facteurs, comme l’âge ou les traitements en cours.
Une étude de validation de la sensibilité et de la pertinence de ces critères a donc été menée par des équipes en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Les données des patients admis dans 172 USI entre 2000 et 2013 ont été examinées, en termes de probabilité de décès. Les malades ayant des signes infectieux et une défaillance d’organes ont été répartis en 2 groupes, selon le nombre de critères de SIRS présents : le groupe SIRS-positif (sepsis supposé sévère) en cas de mise en évidence de deux ou plus critères du SIRS et un groupe SIRS-négatif (sepsis a priori peu sévère), quand moins de 2 critères de SIRS étaient présents.
Sur 1 171 797 patients admis durant la période d’étude, 109 663 présentaient une infection suspectée ou prouvée et une défaillance d'organes. Parmi ceux-ci, 96 385 patients (87,9 %) avaient un sepsis sévère (groupe SIRS-positif) et 13 278 (12,1 %) un sepsis SIRS-négatif. D’un point de vue général, les auteurs notent que le pronostic des sepis sur les 14 ans de suivi de l’étude s’améliore et que globalement, l’évolution de la mortalité dans les 2 groupes est similaire : la mortalité du groupe SIRS-positif passe de 36,1 % en 2000 à 18,3 % en 2013 (p < 0,001). Sur la même période, la mortalité du groupe SIRS-négatif baisse de 27,7 % en 2000 à 8,5 % en 2013 (p < 0,001). En d’autres termes, quel que soit le groupe et à gravité de l’infection égale, la mortalité a diminuée de 1,3 % par an.
L'analyse ajustée effectuée dans un second temps par les auteurs montre que la mortalité augmente proportionnellement pour chaque critère supplémentaire de SIRS présent, sans mise en évidence d’une augmentation brutale de la mortalité à partir d’un seuil de 2 signes réunis. Ainsi, chaque critère supplémentaire de SIRS majore linéairement le risque de mortalité de 13 %.
Selon les résultats de cette vaste étude épidémiologique, le seuil « fatidique » de deux critères de SIRS (au moins) pour définir un sepsis sévère apparaît donc un peu artificiel. Simplement et logiquement, plus la réponse clinique face à une agression est importante, plus l’infection suspectée est grave et plus le pronosticest réservé.
Dr Béatrice Jourdain