
Paris, le samedi 25 avril 2015 – L’antenne parisienne de la School of Life (école fondée à Londres en 2008 par le philosophe Alain le Botton) proposera à partir de l’année prochaine des séances de "bibliothérapie". Concrètement : vous vous présentez à la "consultation" en évoquant vos goûts littéraires, en dessinant à gros traits votre caractère et en signalant vos éventuels soucis, avant qu’une ordonnance vous soit adressée. Dix pages de Shakespeare le matin, vingt-cinq chapitres de Camus le midi et dix minutes de Proust le soir avant de s’endormir, si nécessaire. A l’origine de ces "séances", l’idée selon laquelle les livres peuvent parfois nous soigner (presque) aussi bien qu’une thérapie. C’est également l’objet du livre de Régine Détambel. Cette kinésithérapeute nous propose dans Les livres prennent soin de nous une promenade littéraire, destinée à démontrer comment les grands textes (et non pas les essais sur le bien être qui fleurissent sur les tables des libraires) sont capables de nous offrir l’apaisement ou encore l’aiguillon recherché. Des exemples poignants (tel celui de Laure Adler voulant mettre fin à ses jours après la perte de son enfant et trouvant dans les pages de Duras un chemin possible) sont offerts pour révéler la véritable force thérapeutique des grands romans.
Menée en bateau
Si les livres prennent soin de nous, les écrire peut également nous entraîner sur le chemin d’une guérison. C’est ce qu’assure la romancière espagnole Lucia Etxebarria, devenue célèbre pour son Amour, Prozac et autres curiosités. Aujourd’hui, elle quitte la terre du roman pour un livre hybride, entre auto fiction, essai et manuel. Ecrit à quatre mains avec la psychiatre française Marie-France Hirigoyen, Ton cœur perdra la tête fait le portrait des « amours toxiques » qui entraînent certains êtres dans la perte d’eux-mêmes. Lucia Etxebarria a elle-même vécu une telle expérience, dont elle ne s’est relevée qu’après une lourde dépression. « Je voulais me suicider mais j'ai une petite fille, je ne voulais pas la laisser seule. Je pensais que j'étais folle, que tout était de ma faute. J'ai vu un psychologue, il m'a dit "ton problème c'est lui, pas toi". Ecrire est devenu une sorte de thérapie » affirme-t-elle dans les colonnes du Parisien.
Pas du gâteau
Ce n’est pas seulement lorsqu’ils sont imprimés que les mots peuvent jeter un voile apaisant sur les douleurs. Pourtant, parler et écouter, au sein de son groupe de soutien ne lui apporte rien. Claire (l’héroïne de Cake, interprétée par l’étonnante Jennifer Anniston dans ce contre emploi) souffre. Dans son corps et dans son âme. Rien ne semble pouvoir venir à bout de ses douleurs chroniques et de son mal être et son époux et son fils s’éloignent d’elle. Le suicide d’une jeune femme au sein de son groupe de parole la plonge un peu plus dans la solitude, la dépendance à l’alcool et l’obsession. Pourtant, Claire trouvera elle aussi une médecine douce, l’amitié et le réconfort des proches de son amie disparue.
Trouver un poteau
L’héroïne de Un grand moment de solitude, jouée au théâtre de la Michodière et interprétée par Josiane Balasko (également auteur de la pièce) n’apporte plus de réconfort à quiconque depuis longtemps. Cette psychanalyste est enfermée dans ses propres démons… ou plutôt jetée dehors. Elle a tant accumulé d’objets, qu’il lui est impossible de rentrer chez elle. Son refuge : la demeure d’un confrère psychanalyste, qui pour sa part, victime d’agoraphobie ne met plus un pied dehors. La pièce égratigne gentiment le monde de la psychanalyse, tout en se voulant un joli conte sur l’amitié ; une médecine douce pas toujours sans efficacité.
Livre :
Les livres prennent soin de nous, Régine Détambel, Actes
Sud, 176 pages, 16 euros
Ton cœur perdra la tête, Lucia Etxebarria et Marie-France
Hirigoyen, Editions Héloïse d’Ormesson, 362 pages, 22 euros
Cinéma : Cake, de Daniel Barnz, 8 avril 2015, 1h42
Théâtre : Un grand moment de solitude, de Josiane Balasko, théâtre de la Michodière, 4 bis Rue de la Michodière, 75002 Paris
Aurélie Haroche