
Le risque de décompensation cardiaque est clairement augmenté chez les diabétiques de type 2 – près de la moitié des patients développeront une insuffisance cardiaque – et le diabète exerce un impact négatif sur les patients présentant déjà une insuffisance cardiaque. Il importe donc que le traitement du diabète n'aggrave pas davantage l'état cardiovasculaire. Aux yeux de la FDA, les nouveaux médicaments destinés au traitement du diabète de type 2 doivent donc démontrer qu'ils n'augmentent pas de manière inacceptable le risque cardiovasculaire.
La classe des inhibiteurs de la DPP-4 représente une de ces nouvelles catégories de médicaments. Ils ont été développés dans le but de ralentir l'inactivation des incrétines GLP-1 et GLP. Ce mécanisme d'action augmente la quantité d'incrétine active, qui permet au pancréas de libérer de l'insuline en fonction de la glycémie.
Dans l'étude SAVOR TIMI 53, réalisée chez des diabétiques présentant un risque augmenté d'événements cardiovasculaires, la saxagliptine, un inhibiteur de la DPP-4, n'avait montré aucun effet négatif sur un critère d'évaluation composé du décès cardiovasculaire, de l'infarctus du myocarde ou de l'AVC ischémique. Cependant, le nombre d'admissions à l'hôpital pour cause de décompensation cardiaque était bien significativement plus élevé qu'avec le placebo, surtout chez les patients présentant les concentrations les plus élevées de NT-pro-BNP au départ.
Ce résultat a soulevé de l'inquiétude, et l'équipe de Faiez Zannad (France) a donc voulu vérifier ce qu'il en était dans l'étude EXAMINE, qui se basait sur l'alogliptine, un autre inhibiteur de la DPP-4.
L'étude EXAMINE a été réalisée chez 5 380 diabétiques de type 2 qui avaient présenté récemment un syndrome coronarien aigu (SCA). Les résultats ont montré que le critère d'évaluation primaire composé du décès cardiovasculaire, de l'infarctus du myocarde ou de l'AVC n'était pas plus souvent rencontré avec l'alogliptine qu'avec le placebo. L'étude n'avait pas montré non plus d'augmentation du risque cardiovasculaire pour l'alogliptine au sein d'une population de diabétiques de type 2 avec un risque augmenté d'événements cardiovasculaires. Les auteurs ont entrepris de réaliser une analyse post hoc pour rechercher un éventuel effet sur la décompensation cardiaque.
Le critère d'évaluation étendu a alors consisté dans la mortalité toutes causes confondues, les infarctus du myocarde non létaux, les AVC non létaux, la revascularisation réalisée en urgence pour angor instable et les admissions à l'hôpital pour décompensation cardiaque. L'analyse post hoc recherchait les décès cardiovasculaires et les admissions à l'hôpital pour cause de décompensation cardiaque, ainsi que les modifications du taux de NT-pro-BNP pendant 6 mois.
Le critère recherché par les auteurs était présent chez 433 patients qui avaient reçu de l'alogliptine et chez 441 patients qui avaient reçu un placebo (respectivement 16 et 16,5 % de l'ensemble de la cohorte). Les admissions à l'hôpital pour cause de décompensation cardiaque constituaient le premier événement observé chez 85 patients prenant de l'alogliptine, contre 79 patients qui prenaient un placebo (Hazard Ratio [HR] 1,07; intervalle de confiance à 95 % [IC] : 0,79-1,46). L'alogliptine n'avait aucun effet sur le critère composé du décès cardiovasculaire et de l'admission à l'hôpital pour cause de décompensation cardiaque en analyse post hoc (HR 1,00; IC 95 % : 0,82-1,21). L'analyse par sous-groupes montre donc que l'alogliptine, comparée au placebo, n’entraînait pas plus d'admissions hospitalières pour décompensation cardiaque ni d'aggravation de la décompensation cardiaque préexistante.
Le résultat n'était pas influencé par les antécédents de décompensation cardiaque ni par un taux de NT-pro-BNP élevé au départ. Une diminution comparable de la concentration de NT-pro-BNP était observée dans les deux groupes après 6 mois de traitement, et le recours aux diurétiques était également comparable. Les auteurs concluent qu'une expansion volumique était donc peu probable chez ces patients à haut risque, avec un diabète de type 2 et un SCA récent.
Dr V Schlusmans