
Paris, le samedi 11 juillet 2015 – Les mêmes chemins, les mêmes meubles, les mêmes repas : les familles s’épanouissent dans des quotidiens parfois las, parfois ternes. Mais cet immuable retour des jours et des heures, ces petits détails à mille autres pareils deviennent des manques cruels quand la machine se détraque. Un membre de la famille s’exile de ce quotidien et cette absence étouffe toute possibilité de retrouver le déroulement chronométré des jours. Fantasia, de Wang Chao, raconte cet égarement. Une famille chinoise ouvrière, un père, une mère et deux enfants, connaît une vie simple et classique, jusqu’au jour où le père est atteint d’une leucémie. Fantasia, raconte, sans pathos et avec une certaine poésie, comment les trois autres membres de la famille vont voir leur existence s’extraire de leur route. Il s’agit surtout de faire face aux besoins d’argent, mais aussi au poids de la stigmatisation. Mais cette maladie est également pour chacun l’heure où l’on interroge son rapport avec cet homme, le père, qui jusqu’alors n’était que le rouage d’un mécanisme et qui devient un corps souffrant, un corps aimant.
I just wasn’t made for these times
Le fil sans heurts et sans surprise du quotidien : peut-être est-ce ce qui pourrait sauver Cameron, héros de Daddy cool, film de Maya Forbes. Tout au moins, guidée dans ce sens par un psychiatre, Maggie veut-elle le croire. Elle n’a jamais cessé d’être passionnément attachée à Cameron, même si au fil des ans, la bipolarité de son époux est devenue un poids grandissant pour leur famille. Aussi, le jour où elle choisit de reprendre ses études à New York afin de pouvoir enfin décrocher un emploi lui permettant de faire vivre sa famille, elle lui laisse le soin de s’occuper de leurs deux filles. Un médecin lui assure en effet que le fil routinier, les responsabilités lui permettront de trouver un cadre et de tenir à distance sa maladie. C’est bien sûr cette dernière qui va s’imposer dans le quotidien de Cameron (interprété avec fougue par Mark Ruffalo) et de ses deux filles : la fantaisie, la bizarrerie, les délires insensés guidant les journées que la dépression n’aura pas entachées. Le film est d’une grande tendresse pour ce père malade et pour cette famille qui compose entre l’amour pour ce personnage étrange et son aspiration à mener une vie normale.
God only knows
Certaines destinées exceptionnelles font voler en éclat toute possibilité d’une vie routinière. Brian Wilson n’en aura jamais connue. Le petit génie de la musique, clé centrale du groupe des Beach Boys, a vu le succès l’extraire d’une existence paisible. Mais la gloire ne fut pas seule à lui tracer une route si singulière, la maladie s’en chargea également. Love and Mercy, beau "biopic" réalisé par Bill Pholad évoque le parcours tourmenté de Brian Wilson, chanteur génial, qui souffrait également de schizophrénie. Ici, aussi, la figure du père est centrale : totalement tyrannique, le paternel des frères Wilson n’a sans doute jamais offert à son fils l’environnement rassurant qui lui aurait peut-être parfois permis de mieux composer avec ses angoisses. Il souhaitait assurer une mainmise quotidienne sur les actions, les pensées et les choix de Brian. Jusqu’à ce que ce dernier choisisse une autre musique.
Aurélie Haroche
Films :
Fantasia, de Wang Chao, sortie le 1er juillet, 1h26
Daddy cool, de Maya Forbes, sortie le 8 juillet, 1h30
Love and Mercy, la véritable histoire de Brian Wilson
des Beach Boys, de Bill Pohlad, sortie le 1er juillet, 2h02