Le SML appelle à la création d’une lettre clé pour compenser le coût de l’immobilier en Ile-de-France

Paris, le samedi 10 octobre 2015 – Ce week-end est décisif : les médecins libéraux ont jusqu’à lundi pour renvoyer leur bulletin de vote aux élections de leurs représentants aux Unions régionales des professionnels de santé (URPS). Les enjeux sont à la fois nationaux (avec notamment en ligne de mire le retrait de la loi de santé souhaité par l’ensemble des syndicats), mais également régionaux, comme nous le rappelle le docteur Frédéric Prudhomme du Syndicat des médecins libéraux (SML) qui s’intéresse aux enjeux spécifiques de l’Ile de France, afin notamment d’inciter plus largement les praticiens à s’installer dans cette région.

Entretien avec le docteur Prudhomme, candidat SML aux élections aux URPS en Ile de France

(L’interview nous a été accordée avant la clôture de la campagne)

JIM : Quelles sont les principales revendications du SML au niveau national ?

Dr Frédéric Prudhomme : Notre première revendication c’est évidemment le retrait de la loi de Santé. Nous nous sommes toujours positionnés ainsi. Nous sommes notamment totalement opposés au tiers payant. Il faut donc retirer le texte et le rediscuter, afin que l’on obtienne une réforme qui soit cohérente et adaptée aux enjeux de la médecine libérale de demain.
Au-delà de la loi de santé, nous défendons bien sûr le secteur 2 et nous souhaitons l’ouverture d’un espace de liberté tarifaire pour nos confrères en secteur 1. Nombre d’entre eux souhaitent en effet exercer d’une façon différente : il faut leur laisser un espace de liberté pour le faire. Soit on le crée, soit on adapte le contrat d’accès aux soins pour qu’il puisse bénéficier davantage au secteur 1. Une action est nécessaire, obligatoire sur ce terrain. D’une manière générale, il est essentiel de libérer du temps médical. Le souci prégnant actuellement ce n’est en effet pas le nombre de médecins, c’est le temps médical. Le temps que prennent les tâches administratives dans notre exercice au quotidien, est au détriment de la prise en charge de nos patients. Il est ainsi essentiel de se pencher par exemple sur les moyens pouvant être donnés aux médecins pour qu’ils aient la possibilité d’avoir un secrétariat administratif.

JIM : Et en Ile de France, quelles sont les attentes particulières de votre syndicat ?

Dr Frédéric Prudhomme : Nous considérons que l’enjeu des élections aux URPS est bien sûr national, mais également territorial, régional. Le SML se consacre très clairement à l’exercice quotidien de nos confrères. Et il y a régionalement des actions à mener en la matière.

Sécurité : des solutions concrètes s’imposent

Je voudrais tout d’abord parler de la sécurité.  Nous assistons à une progression des agressions contre les médecins.  Ces derniers  sont de moins en moins respectés. Aussi, souhaitons-nous la sanctuarisation des cabinets. Pour que les jeunes soient davantage incités à s’installer, il faut que la justice soit très sévère dans ce type d’affaires. Et il s’agit d’un phénomène particulièrement prégnant en Ile de France et nous espérons une action forte aussi bien au niveau de l’Agence régionale de la Santé que de la préfecture.

JIM : Des accords nationaux ont pourtant été signés en vue d’améliorer la sécurité des médecins libéraux.

Dr Frédéric Prudhomme : Ces accords de principe doivent être transformés en solutions concrètes. Par exemple, pourrait-être imaginée la mise en place d’un "bouton", qu’il suffirait d’actionner pour que soit alertée la police.  De même les praticiens effectuant des visites à domicile doivent pouvoir être systématiquement assurés qu’ils seront protégés en cas de difficultés. Il s’agit de réponses simples. 

JIM : La possibilité de plaintes directes a cependant été mise en place ?

Dr Frédéric Prudhomme : On peut peut-être porter plainte plus facilement qu’avant. Cependant, dans mon département, je suis régulièrement alerté par des médecins qui ne parviennent pas à contacter la police.  Il faut plutôt mettre l’accent sur les dispositifs concrets. Avec le SML, nous souhaitons nous battre pour imaginer des systèmes offrant une vraie protection à nos confrères et consœurs.

JIM : Au-delà de la question de la sécurité, quelles sont les attentes spécifiques en Ile de France ?

Dr Frédéric Prudhomme : La question de l’immobilier est évidemment centrale.

Une lettre clé spécifique face à l’explosion de l’immobilier

Nous militons pour la création d’un coefficient spécifique en Ile-de-France, une lettre clé. Le coût de l’immobilier prend en effet une importance phénoménale dans les charges de nos confrères et il n’est plus compatible avec le montant des honoraires actuels. Les conséquences s’observent tous les jours : l’année dernière, un seul médecin généraliste s’est installé à Paris. Si nationalement, il n’y a pas d’augmentation du C, il faut qu’on se batte au moins localement pour compenser le coût de l’immobilier. Cela me semble obligatoire. 

JIM : Ce discours a-t-il, selon vous, une chance d’être entendu ?

Dr Frédéric Prudhomme : Il va falloir qu’il soit entendu. Si on veut que le monde libéral survive, il va falloir qu’il soit entendu. Il y a de moins en moins de médecins qui s’installent.

Le tiers payant va accélérer la cessation d’activités des plus âgés

Les perspectives démographiques sur les trois à quatre  ans à venir sont très inquiétantes. Il y a une vraie alerte à lancer. Sous le coup du tiers payant, les plus âgés vont arrêter d’exercer.  Pour l’heure, les retraités actifs maintiennent à peu près le niveau, mais après leur départ cela va être catastrophique. Ne pas s’en rendre compte et ne pas tirer la sonnette d’alarme, c’est ne pas être responsable. Les syndicats sont là pour ça. Il faut absolument qu’on améliore les conditions d’exercice de nos confrères libéraux si on veut qu’ils s’installent. Bien sûr, il sera nécessaire de se mettre autour d’une table pour discuter des détails des mesures à adopter. 

JIM : Quelles sont les autres spécificités en Ile-de-France ?

Dr Frédéric Prudhomme : Rejoignant les considérations immobilières précédentes, l’Ile de France est également particulièrement concernée par la question de l’accessibilité. Nombre de confrères, dans des villes comme Paris, mais pas seulement, je pense par exemple aussi à Versailles ou Saint-Germain sont installés dans des immeubles anciens où les travaux sont impossibles ou à des coûts qui ne sont pas tenables.

Aller plus loin que les dérogations prévues actuellement

Il faut donc une adaptation de la loi sur l’accessibilité des personnes handicapées. Une absence d’adaptation se fera au détriment de la médecine de proximité. Il ne sera en effet plus possible que de s’installer  en périphérie des villes et s’il est évidemment nécessaire de permettre l’accès aux soins des personnes handicapées, cela ne peut se faire au détriment du reste de la population.

JIM : Vous proposez donc que la loi soit rediscutée ?

Dr Frédéric Prudhomme : Non car cela n'est pas possible d'un point de vue législatif, mais elle doit être amendée pour s'adapter aux exigences libérales mais il n’est évidemment pas question d'en remettre en cause le principe.

JIM : A vos yeux, les agendas programmés d’accessibilité et les dérogations ne sont pas suffisants ?

Dr Frédéric Prudhomme : Bien sûr, cela est insuffisant. Nous sommes régulièrement alertés par des confrères qui ne sont pas parvenus à obtenir de dérogation.

Places de parkings et places de crèche

JIM : Quelle autre mesure préconisez-vous pour favoriser l’installation des jeunes médecins ?

Dr Frédéric Prudhomme : On manque de médecins qui s’installent. Il faut donner aux jeunes la possibilité de s’occuper de leurs enfants. Il s’agit là encore de s’intéresser au quotidien des praticiens. Ainsi, propose-t-on qu’il y ait des places prioritaires en crèche pour les jeunes praticiens qui s’installent. Ce ne sont pas des mesures très compliquées à mettre en place, mais qui peuvent attirer les jeunes.

JIM : Ainsi selon vous, ces solutions concrètes valent mieux que les aides et autres bourses ?

Dr Frédéric Prudhomme : Il faut jouer sur tous les leviers. Des compensations économiques seront obligatoires. Cependant, en raison du caractère très serré des budgets, d’autres solutions doivent également être imaginées. Aussi nos propositions sont peu coûteuses mais peuvent avoir un véritable impact sur la vie quotidienne des médecins.  Il en est de même en ce qui concerne le stationnement. Il faut par exemple permettre aux médecins d’utiliser les places de livraison sans crainte de la contravention.  Faciliter la vie des médecins est à mes yeux le rôle des élus aux URPS dans leurs négociations avec les ARS, avec les maires. Ainsi souhaite-t-on que nos confrères s’expriment, qu’ils soient conscients de l’importance de ce scrutin,  notamment vis-à-vis du gouvernement. Il faut par ailleurs leur affirmer qu’il est possible de leur apporter des solutions concrètes. 

Propos recueillis par Aurélie Haroche

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