Vers des déconventionnements massifs après l’adoption de la loi de santé ?

Paris, le mercredi 14 octobre 2015 – La Confédération des syndicats médicaux français s’est irritée la semaine dernière des mouvements de grève organisés par les autres syndicats destinés une nouvelle fois à protester contre le projet de loi de santé, estimant que ces manifestations relevaient de « mascarades électoralistes ». Pourtant, sur le terrain, les médecins libéraux apparaissent très éloignés de ces considérations, comme en témoigne la détermination que certains continuent à afficher, au-delà même de la clôture des votes aux Unions régionales des professions de santé (URPS).

Déconventionnement : la machine est en marche

Depuis quelques mois, une large mobilisation a pris de l’ampleur dans plusieurs localités françaises. Le bassin roannais s’est imposé comme fer de lance de ce mouvement échappant aux syndicats classiques. Ainsi, en mai dernier, la centaine de praticien du bassin Roannais, qui compte 18 000 habitants avaient fermé leurs cabinets pendant trois jours. Il s’agissait non seulement de mettre en lumière les difficultés locales (une désertification médicale de plus en plus importante et des médecins croulant sous la charge de travail) mais également de dénoncer un projet de loi ne prenant nullement en compte les « problématiques » des praticiens. Depuis ce coup de force qui avait été remarqué par plusieurs médias nationaux et qui avait été rapidement soutenu (pour ne pas dire récupéré) par les syndicats, les praticiens Roannais demeurent fortement engagés. Ainsi, alors que beaucoup de praticiens ont repris le travail en France dès le 8 octobre, à Roanne, les cabinets sont demeurés fermés jusqu’au vendredi soir. S’ils ont repris le travail ce lundi matin, les médecins du bassin continuent à observer une grève des astreintes de nuit et des gardes du week-end. Surtout, à Roanne on se prépare déjà activement en vue de l’adoption définitive de la loi et l’arme majeure qui pourrait être utilisée est celle du déconventionnement. Quelques 70 % des médecins du bassin Roannais se sont déclarés favorables à une telle mesure et depuis le début de la semaine, les préparatifs administratifs en vue de déconventionnements massifs ont commencé. Ce n’est pas seulement contre la généralisation du tiers payant que s’élèvent ces praticiens, mais plus encore contre l’esprit même de la loi et de la politique adoptée par le gouvernement en matière de santé : « Cette loi va atteindre la liberté de choisir son médecin et la liberté de prescription. C’est contraire au serment d’Hippocrate » assurent-ils.

Rupture consommée avec le gouvernement

Souvent brandie, mais rarement mise à exécution (si ce n’est sporadiquement), la menace du déconventionnement témoigne en tout état de cause de l’ampleur du malaise des praticiens, face au projet de loi de santé et plus largement face à la sensation d’un mépris généralisé de la classe politique à leur égard. Par ailleurs, en se positionnant en faveur d’une telle arme, les praticiens roannais se démarquent encore un peu plus des lignes syndicales traditionnelles, qui n’ont quasiment jamais accepté de s’engager sur une telle voie (et se sont contentées d’assurer de leur soutien les médecins qui iraient jusqu’au bout !). Roanne pourrait-il inspirer d’autres groupements de médecins ? Partout en France, des collectifs indépendants prennent de l’ampleur et déploient de nouvelles formes d’action, insistant notamment sur la médiatisation de leur combat et la sensibilisation des patients.

Aurélie Haroche

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