Thérapie (ou pas)

Paris, le samedi 7 novembre 2015 – En tant que médecine douce complémentaire souvent efficace (ou pas), l’écriture pourrait trouver sa place dans les facultés. Beaucoup ont confié combien jeter sur le papier leurs souffrances, physiques ou psychologiques, leur permettait de trouver une échappatoire, sans doute pas une guérison mais tout au moins un apaisement.

Pour Laure Limongi, parallèlement à l’accompagnement de ses praticiens et à des traitements médicamenteux, certes efficaces mais aux lourds effets secondaires, ce fut la seule thérapie valable. La jeune femme souffre d’algie vasculaire de la face, maladie qui est l’héroïne de son dernier roman : Anomalie des zones profondes du cerveau. La jeune femme raconte comment après avoir épuisé toutes les autres méthodes qui s’offraient à elle, elle comprit que l’écriture serait son unique rempart. Grâce à son petit carnet, qu’elle conserve en permanence, elle mène une enquête sans scrupules et sans indulgence sur ses activités et ses comportements, afin de traquer le moindre facteur déclenchant  « des milliers de vers traversant le cerveau » ou encore le « pic à glace enfoncé derrière l’œil ». Ainsi, son roman est-il le récit non pas d’une guérison, inaccessible, mais d’une guerre avec pour arme la plus solide, l’écriture.

Ligne de front

La guerre, la vraie, Julie, l’a côtoyée à plusieurs reprises. Elle est infirmière militaire adjudante et a servi tout aussi bien dans la Marine qu’au service psychiatrique de l’hôpital des armées Bégin et enfin à Vincennes. Quand elle ne soigne pas les combattants, quand elle ne s’occupe pas de ses trois enfants, Julie écrit. En vers. La poésie est en effet son refuge, une thérapie contre les explosions, contre les blessures de guerre, contre la folie qui jette des enfants comme soldats sous les bombes. Aux côtés de Jean-Marc Collet, chef de bataillon, ils viennent de signer un recueil de poésie, porté notamment par les alexandrins de Jul (le nom de plume de Julie), intitulé Blue Line.

Rang de tricot

Ses lignes à elle sont des rayures, intemporelles, légendaires. Sonia Rykiel, une des grandes stylistes du vingtième siècle est aujourd’hui âgée de 85 ans et a révélé il y a quelques années être atteinte de la maladie de Parkinson. Cette pathologie qui chaque jour affaiblit la superbe de la grande rousse flamboyante est décrite dans le récit que vient de signer sa fille, Nathalie, sous le titre de 4 décembre. Dans cet ouvrage, celle qui a toujours travaillé avec sa mère, raconte son enfance (marquée par la cécité de son frère, Jean-Philippe auquel son père s’est entièrement dévoué), sa vie d’adulte dans l’ombre de la grande Sonia et aujourd’hui son combat pour prendre soin de sa mère, ses angoisses quotidiennes de la voir davantage décliner. Cependant, Sonia, dont l’écriture est le choix de sa vie (elle répète qu’elle ne se destinait nullement au monde de la mode) affirme : « Ce livre n’est pas du tout une thérapie. J’ai vu beaucoup de psy dans ma vie, j’en ai épuisé un grand nombre ! La thérapie permet de débloquer des nœuds et ce n’est pas une partie de plaisir. Dans l’écriture, il y a beaucoup de dureté mais il y a du plaisir aussi » confiait-elle il y a quelques semaines.

Portée de notes

Le choix de Bertrand Burgalat ne fut pas la plume, mais la musique. Le célèbre musicien n’évoque cependant qu’en marge cette composante essentielle de son existence dans le livre qui vient de paraître Diabétiquement vôtre. Comme son nom l’indique, l’ouvrage revient sur son diabète de type 1, découvert lorsqu’il avait onze ans et qui rythme son existence. Bertrand Burgalat ne cache rien de la discipline quotidienne qui s’impose à lui, de ses tentations d’errance à la fin de l’adolescence ou de ses colères contre le business du diabète et l’absence de remboursement de dispositifs permettant pourtant de contrôler plus efficacement sa maladie. Son ouvrage cependant n’est pas destiné à exorciser la douleur, il n’était pas une thérapie, mais répondait au souhait de « rendre leur dignité aux malades, rendre hommage aux familles, aux soignants, aux associations, et même aux laboratoires qui affrontent cette maladie » a-t-il déclaré à Paris Match. Pour soigner un peu le monde, en somme.

 

Livres :

Anomalie des zones profondes du cerveau, Laure Limongi, Grasset, 17 euros, 208 pages

Blue Line, recueil de poésie, Editions Langlois Cécile, 14 euros

4 décembre, Nathalie Rykiel, Plon, 15,90 euros, 200 pages

Diabétiquement vôtre, Bertrand Burgalat, Calmann-Lévy, 17 euros, 304 pages

Aurélie Haroche

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