Demain, les GHT

Les 1 100 hôpitaux français rejoindront demain 1er juillet l'un des 150 GHT, l’une des mesures les plus ambitieuses de la loi de modernisation de notre système de santé. Leur objectif est de favoriser la collaboration des hôpitaux sur un territoire donné, autour d'un établissement support. Selon la ministre de la Santé « il s’agit de faire en sorte que les établissements publics de santé d’un même territoire définissent une stratégie de prise en charge partagée autour d’un projet médical commun et gèrent ensemble certaines fonctions transversales (systèmes d’information, achats…) ». Les établissements, à l’exception de l’AP-HP et de ceux qui relèvent d’une dérogation, devront avoir transmis une convention constitutive à leur ARS avant le 1er juillet. A cette date chaque Directeur Général d’ARS arrêtera la liste des GHT et des établissements susceptibles de les composer. Pour autant, les GHT ne seront effectivement créés qu’une fois que la convention aura été approuvée, le Directeur Général de l’ARS disposant d’un délai de 2 mois.

Les GHT méconnus mais bien accueillis des Français

La formation des GHT, encore largement méconnue des Français, intervient dans un contexte favorable dans la mesure où des derniers sont largement persuadés que la France prodigue les meilleurs soins hospitaliers, d’après leur réponse à la cinquième vague du baromètre Santé 360 d’Orange Healthcare et la MNH réalisé par Odoxa. Ils ont une bonne image de leurs hôpitaux publics (79%) et de leurs établissements de santé privés (81%) et 75% d’entre eux citent la France comme le pays prodiguant les meilleurs soins hospitaliers. Seuls 10% de Français ont une idée assez précise de ce qu'est un GHT et 25% en ont entendu parler, mais ne savent pas précisément de quoi il s'agit, et 65% n'en ont jamais entendu parler. Néanmoins une fois que le principe leur a été expliqué, 81% des personnes interrogées estiment que c'est une "bonne chose" pour le système de santé en général, et pour rationaliser l'accès aux soins afin de le rendre plus efficace et moins coûteux. Huit Français sur dix estiment que la mise en place des GHT est une "bonne chose" pour l'accès aux soins de tous et pour faire face aux déserts médicaux. Enfin c'est une "bonne chose" pour les patients (78%) et pour les personnels hospitaliers (74%).

Méfiance dans les hôpitaux

Les présidents de la Fédération hospitalière de France (FHF) et des conférences hospitalières (directeurs d'hôpitaux et présidents des CME) ont écrit à la Marisol Touraine pour lui demander des assurances sur le plan de 2 milliards d'euros auquel elle s’est engagée fin mai pour l’hôpital ; un nouveau plan d'investissement sur cinq ans visant à soutenir la réorganisation liée à la création des GHT. Il doit notamment aider à financer la mutualisation des systèmes d’information et l’innovation. Ils exigent que ce plan corresponde bien « à des moyens nouveaux ». « Il serait en effet peu compréhensible que cette enveloppe soit alimentée par transformation de crédits déjà existants au sein de l’Ondam », expliquent-t-ils.

Le SYNCASS-CFDT, Syndicat des directeurs, cadres, médecins, dentistes et pharmaciens des établissements sanitaires et sociaux publics et privés, a relayé les alertes de ses membres sur les GHT lors du comité de suivi du 23 juin consacré en particulier à l’information sur la mise en place des GHT et le plan d’accompagnement. Dans un communiqué, Il fait part de son inquiétude sur de nombreux points, demandant en particulier une « indispensable clarification de la gouvernance ». Quant aux 2 milliards annoncés il estime qu’ « ils ne pourront qu’être prélevés sur l’Ondam des prochaines années », et ajoute que « son montant ne semble pas résulter d’une analyse fine des besoins d’investissement ou de fonctionnement, qui aurait supposé de connaître la structuration des GHT et les projets. »

De son côté, à l’issue du même comité le SMPS (Syndicat des Manageurs Publics de Santé) « a surtout appelé à ce que le dialogue constructif entre les pouvoirs publics et les hospitaliers se poursuive après la date du 1er juillet ». Il attend « un accompagnement adapté des professionnels », soulignant les fortes inquiétudes des directeurs, ingénieurs et cadres dans la mise en œuvre des GHT.

En aide à la mise en place des GHT

Pour répondre aux praticiens hospitaliers qui se demandent ce qui va changer dans leur exercice, l’intersyndicale Action Praticiens Hôpital a fait récemment le point de la situation en juin 2016 dans un mini-guide intitulé « Quoi de concret pour les PH en juin 2016 ? - GHT saison 3 ». Elle précise ainsi plusieurs points, des définitions d’un GHT et d’un projet médical partagé à la possibilité de constitution de pôles inter établissements, auxquels elle préfère plutôt des Fédérations Médicales inter-hospitalières. Elle rappelle notamment le calendrier, et côté gouvernance médicale que les CME doivent se prononcer sur l’instance médicale commune, collège médical, ou Commission Médicale de Groupement (http://www.cphweb.info/spip.php?article852).

Pour assister les établissements, la FHF se dote d’un dispositif d’appui dédié au suivi de la préparation des projets médicaux partagés. Cette démarche permettra d'accompagner les établissements durant la période d'un an qui s'ouvrira à compter de ce 1er juillet pour la finalisation des projets médicaux partagés des nouveaux groupements. Une lettre de mission, préparée en articulation étroite avec les Conférences hospitalières, viendra préciser les modalités pratiques de cette démarche dans les prochains jours. Un dispositif de suivi dédié à la participation des établissements du secteur médico-social aux nouveaux groupements sera également déployé très prochainement.

Toutes les conventions constitutives seront-elles bien transmises aux ARS pour demain ? Le Nord-Dauphiné a été le premier GHT d'Auvergne-Rhône-Alpes et l’un des premiers en France à signer le 17 juin une convention constitutive préparée depuis 18 mois, mettant en commun le destin des hôpitaux de Bourgoin-Jallieu, La Tour-du-Pin, Morestel et Pont-de-Beauvoisin. A la même date le GHT Caux-Maritime a signé la première convention constitutive de Normandie. Il concerne sept établissements: le CH de Dieppe, établissement support, le CH de Eu, le CH de Saint-Valéry-en-Caux, l'Ehpad Le Tréport, l'Ehpad de Saint-Crespin, l'Ehpad de Luneray et l'Ehpad d'Envermeu.

Dominique Monnier

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Vos réactions (1)

  • GHT : prime au gros

    Le 01 juillet 2016

    On peut le tourner dans tous les sens, ce genre de "réforme" est l'annonce d'une prime aux gros établissements (les CHU) : rationnaliser veut dire éviter les redondances inutiles (par définition), et des CH mêmes performants seront sacrifiés pour "réorienter" les flux de patients, de soignants et de crédits vers des CHU, surtout s'ils tournent mal.

    Dr F.Chassaing

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