Des avis divergents sur les risques cancérigènes du glyphosate

Le glyphosate est l'herbicide le plus répandu au monde. Initialement breveté par Monsanto dans les années 1970, son brevet a expiré en 2000. Il est aujourd'hui présent dans plus de 2000 produits utilisés par les agriculteurs et les jardiniers amateurs. L'Europe décide de l'autorisation de sa commercialisation et renouvelle cette décision tous les 10 ans.

En mars 2015, le centre international de recherche sur le cancer (CIRC ou IARC en anglais) a classé l'herbicide glyphosate comme agent carcinogène probable pour l'homme (classe 2A) en raison de preuves suffisantes de sa carcinogénicité dans les études animales, de preuves limitées chez l'homme et de preuves fortes pour deux mécanismes carcinogènes. L'IARC révèlait une association entre glyphosate et lymphomes non hodgkinien, un effet carcinogène significatif pour des tumeurs rénales et les hémangiosarcomes dans les études animales. L'IARC concluait également à une forte preuve de génotoxicité et de stress oxydatif incluant des données de lésions de l'ADN dans le sang périphérique des sujets exposés.

En novembre 2015, l'autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) quant à elle a jugé improbable ce risque cancérigène. Elle rejettait les conclusions de carcinogénicité des études animales les considérant comme des événements aléatoires. Elle ignorait également les preuves de génotoxicité. Elle confirmait le stress oxydatif mais ayant réfuté les autres résultats sur un possible risque carcinogène, le considèrait insuffisant pour une classification du glyphosate comme agent carcinogène.

Pas les mêmes bases de jugement

Les données utilisées par les deux organismes ne sont pas exactement les mêmes. L'IARC se base sur les études publiées dans la littérature scientifique : études épidémiologiques, expérimentation animales ou sur cellules humaines. L'EFSA utilise aussi des données non publiées et notamment les résultats d'essais limités fournissant les données minimales pour la commercialisation et in fine accorde peu de poids aux études publiées et un excès de confiance aux résultats fournis par les industriels.

Les critères retenus par les deux organismes sont aussi différents. L'EFSA ne prend en compte que les données concernant le glyphosate seul alors que l'IARC se penche aussi sur les formulations qui en contiennent.

Sur la base des évaluations scientifiques il est raisonnable en l'absence de preuves du contraire de considérer le glyphosate comme agent carcinogène pour l'homme

Dr Maryvonne Pierre-Nicolas

Référence
Portier CJ et coll. : Differences in the carcinogenic evaluation of glyphosate between the International Agency for Research on Cancer (IARC) and the European Food Safety Authority (EFSA). J Epidemiol Community Health., 2016;70:741-5. doi: 10.1136/jech-2015-207005.

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Vos réactions (2)

  • Bravo pour le lobby Monsanto

    Le 18 août 2016

    Rappelons qu'il y a 15000 lobbiistes à Bruxelles auxquels les membres de la Communauté européenne font continuellement appel, y compris pour rédiger des textes réglementaires ! Il est évident que Monsanto a su trouver des arguments "convaincants"" auprès des membres de l'EFSA.

    La Commission vient de reporter de deux ans l'interdiction des pesticides ayant une action hormonale...

    L'Europe ne sera crédible que lorsqu'on interdira tout contact entre tous les membres de la Commission et ces lobbiistes. Mais je crains que ce ne soit pas pour demain, vu les "largesses" prodiguées par les firmes... On pourrait en faire autant pour les lobbies subventionnant certains députés ...

    Dr Guy Roche

  • Il y a beaucoup plus dangereux que le glyphosate

    Le 19 août 2016

    L'alcool, le tabac ou le cannabis par exemple... mais là il s'agit de substances naturelles!

    Et quand on voit les solutions de remplacement des herbicides: vinaigre (les pluies acides sont oubliées au passage), bouteille de butane ou eau bouillante... je préfère de loin utiliser le glyphosate deux fois par an pour entretenir ce qui ne peut pas se faire à la binette!

    Quand aux lobbies, vous oubliez les plus dangereux: les multiples lobbies écologistes, vous savez ceux qui ont fait remplacer quelques ppm de sels de plomb par 10% de benzène (cancérigène prouvé) dans l'essence, protègent des espèces invasives et vectrices de zoonoses (ragondins, rats musqués...), empécher les politiques de démoustication dans le sud de la France ou encore remplacer le nucléaire par du charbon en Allemagne!

    Dr FL

    Mais bon là c'est vrai ce sont des lobbys politiquement corrects!

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