
L’efficacité des traitements contre la grippe reste plutôt incertaine. La prévention, et notamment la vaccination, reste donc l’option la plus efficace pour réduire la propagation des épidémies. Actuellement deux stratégies se côtoient. L’une consiste à vacciner les individus à risque de complications (immunodéprimés, femmes enceintes, personnes âgées). C’est la stratégie qui prévaut dans la plupart des pays européens. L’autre politique est d’étendre la vaccination à tous les enfants en bonne santé. C’est le cas dans les pays d’Amérique du Nord et du Sud et dans certains pays européens comme le Royaume-Uni.
Les données de l’OMS indiquent que les enfants de moins de 5 ans, et surtout ceux de moins de 2 ans, paient un lourd tribut à la grippe. Mais la question ne se limite pas à cela. Car les enfants jouent aussi un rôle important dans la transmission du virus. L’évaluation de l’impact de l’extension de la vaccination antigrippe à tous les enfants semble donc essentielle, dans l’éventualité d’une modification des recommandations vaccinales.
Un effet indirect et direct
Une étude par modélisation a été réalisée dans ce sens en
Belgique. Les auteurs ont considéré une immunisation apportée par
le vaccin intra-nasal tétravalent atténué.
Les études par simulation suggèrent qu’une couverture vaccinale de
75 % des enfants de 2 à 17 ans éviterait chaque année 374 mille cas
de grippe symptomatique, soit 57 % du nombre actuel de cas déclarés
en Belgique. La majorité de ces cas évités concernerait des
adultes, soit 244 mille cas, reflétant l’effet indirect de la
vaccination. Un autre scenario se révèle lui aussi efficace : une
couverture vaccinale de 75 % des 2-11 ans et de 50 % des 12-17 ans
éviterait 333 200 cas annuels dont 213 mille cas chez des
adultes.
En revanche, la vaccination des seuls enfants de 2 à 5 ans aurait
une efficacité certaine sur la protection directe, mais un effet
limité sur la protection indirecte, même avec une couverture de 90
% (40 800 cas annuels évités chez les adultes).
Enfin, cette étude montre que vacciner tous les enfants n’a pas
seulement un impact sur l’incidence des cas chez les adultes. Cela
évite aussi deux fois plus de cas de grippe chez les enfants à
risque, en comparaison avec la vaccination de ces seuls enfants à
risque (8 485 vs 4 965 cas annuels pour une couverture vaccinale de
75 %).
Il existe pour le moment peu de données statistiques émanant des
pays qui ont déjà étendu leurs programmes de vaccination à la
population pédiatrique. Cette modélisation, qui utilise un modèle
de transmission dynamique développé en Allemagne et déjà testé en
France, apporte des données concrètes et convaincantes sur l’impact
positif de cette option de prévention.
Dr Roseline Péluchon