
Paris, le samedi 8 octobre 2016 – C’est une ritournelle un peu bête que lancent les mères quant les enfants chipotent dans leurs assiettes : « Pense à ceux qui n’ont rien à manger ». Légèrement absurde, la remarque témoigne cependant du caractère moralement honteux du gaspillage alimentaire… bien qu’aujourd’hui l’accent soit également mis sur ses méfaits écologiques. Pour être un peu moins abstraite, les mères pourront aujourd’hui signifier à leurs chérubins dégoutés devant leurs légumes qu’avec l’ensemble des aliments jetés quotidiennement par la restauration collective, on pourrait nourrir pendant cinq jours l’ensemble des Français, midi et soir.
Adieu veau, vache, champignons
Cantines, restaurants d’entreprises, selfs de maison de retraite : l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) n’a pas scruté les assiettes de la restauration collective, mais ses poubelles. Elle a ainsi constaté que 17 % des aliments servis sont jetés. Le coût de ce gâchis s’élève à 27 centimes par repas, un montant qui grimpe à 68 centimes si l’on inclue la main d’œuvre et la gestion des déchets. Ce sont les légumes, les viandes, les poissons et les œufs qui le plus souvent finissent ailleurs que dans l’estomac : ils représentent 60 % des produits jetés (en quantité).
Qu’est-ce qu’on mange ? La même chose qu’hier !
Surprise, ce ne sont pas les cantines des jeunes gourmets qui sont les championnes du gaspillage. Les repas les plus souvent délaissés sont ceux servis dans les hôpitaux. Dans les établissements de santé, 20 % des quantités préparées sont perdues (contre 18 % à l’école). Ainsi, 230 000 tonnes d’aliments sont gâchés dans le secteur de la santé sur les 1,5 milliards de repas concoctés chaque année, représentant un coût de 420 millions d’euros.
L’ADEME demeure succincte en termes de recommandations. D’une manière générale, elle constate que dans les établissements où le type de cuisine permet de proposer le même plat les jours suivants, il est possible de limiter les quantités gaspillées. Ses observations quant au type d’aliments prioritairement jetés la confortent par ailleurs dans son conseil, déjà formulé, « de varier les repas en alternant les menus végétariens et carnés ». L’ADEME invite également à un meilleur calibrage des portions et à un plus grand soin quant à la présentation et la préparation. Dans le secteur de la santé, le travail est sans doute plus difficile à réaliser, en raison de la diversité des patients et de la variété des régimes à respecter. Cependant, certains des facteurs de rejet sont faciles à identifier : les repas servis froids et à des horaires ne correspondant le plus souvent pas aux habitudes des patients, la présentation peu soignée des mets et le manque de saveur sont souvent des coupes faims même pour les moins difficiles des convives, plus particulièrement dans un contexte où le stress, le manque d’activité et tout simplement la maladie ne favorisent guère l’appétit.
Aurélie Haroche