La question de la biopsie au cours des infections à VIH avec lésion cérébrale focale

Les infections par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) peuvent se compliquer d’une atteinte cérébrale qui peut parfaitement revêtir l’aspect d’une lésion focale. L’exemple de la toxoplasmose est le premier qui vient à l’esprit. Certes, avec les progrès de l’imagerie médicale, notamment de l’IRM avec injection de gadolinium, le diagnostic étiologique est le plus souvent posé, mais il est des tableaux cliniques déroutants qui échappent à cette technique. Face à des situations d’urgence, quand l’état neurologique se dégrade rapidement, force est d’envisager d’autres stratégies diagnostiques qui vont faire appel à la biopsie cérébrale, geste qui ne suscite guère d’enthousiasme en raison de sa lourdeur et de ses complications potentielles, mais nécessité fait loi…

Une méta-analyse a été réalisée pour compléter l’exploitation d’une base de données constituée en Chine, de façon à évaluer la valeur diagnostique de ce geste effectué précocement et ses complications, respectivement avant et après l’avènement des traitements antirétroviraux les plus actifs, en règle les trithérapies. Les données locales ont été revues rétrospectivement et la littérature internationale a permis d’ajouter 25 études. Au total, la méta-analyse a porté sur un effectif de 1 209 patients atteints d’une infection par le VIH. De chaque étude ont été extraites les informations suivantes concernant chacun des malades inclus: données démographiques, technique de la biopsie, résultats histopathologiques et pronostic.

L’évolution et les complications ont été étudiées au moyen d’un modèle à effets aléatoires, en tenant compte, pour certains critères, de la période d’inclusion, en l’occurrence avant et après l’introduction des trithérapies. Les corrélations entre le pronostic et les variables basales ont été établies au travers d’une analyse par méta-régression. Les proportions de diagnostic histopathologique ont été tabulées et comparées en tenant compte du facteur temps précédemment évoqué. Les analyses des courbes de survie n’ont été réalisées que chez les patients qui ont bénéficié des traitements les plus actifs.

Rendement diagnostique élevé et faible morbidité

Les indications les plus courantes de la biopsie cérébrale (84 %) ont été les suivantes : (1) incertitude majeure sur le diagnostic de toxoplasmose (n = 8, 42,1  %) ; (2) lésion focale inexpliquée (n = 5, 26,3 %) ; (3) indications 1 et 2 combinées (n = 3, 15,8 %). Le nombre de biopsies rapporté à l’effectif total s’est avéré très faible (16/1 209, 1,32 %), ce qui confirme les hypothèses énoncées dans l’introduction. La biopsie a été un succès diagnostique dans la majorité des cas (92 %, intervalle de confiance à 95 %, IC, 90-93,8 %). Elle a eu un impact sur la stratégie thérapeutique plus d’une fois sur deux (57,7 %, IC, 45,9-69,1 %) et s’est avérée bénéfique sur le plan clinique plus d’une fois sur trois (36,6 %, IC, 26,3-47,5 %). La morbidité a été estimée à 5,7 % (IC, 3,6-8,3 %) et la mortalité à 0,9 % (IC, 0,3-1,9 %). Le taux de succès diagnostiques a été significativement plus élevé après l’avènement des trithérapies, soit 97,5 % vs 91,9 % avant, p = 0,047), mais aussi dans le cas des lésions prenant le contraste en IRM, l’odds ratio correspondant étant de 2,54 (IC, 1,25-5,15) (p < 0,01 versus absence de prise de contraste). La durée médiane de la survie après la biopsie a été estimée à 225 jours (extrêmes, 90-2 446).

La biopsie cérébrale chez les patients atteints d’une infection par le VIH avec atteinte cérébrale est très rarement pratiquée. Cependant, quand elle est nécessaire, son rendement diagnostique s’avère élevé, au prix d’une morbidité et d’une mortalité qui restent acceptables, face à la gravité de la situation clinique. Elle peut être envisagée précocement dans les cas où le diagnostic de toxoplasmose ne peut être affirmé avec certitude, en raison d’un tableau clinique atypique et d’une IRM non concluante, ce qui reste une éventualité rare, si l’on juge d’après cette méta-analyse.

Dr Giovanni Alzato

Référence
Lee AM et coll. : Safety and diagnostic value of brain biopsy in HIV patients: a case series and meta-analysis of 1 209 patients. J Neurol Neurosurg Psychiatry, 2016; 87:722-33.

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