
Si le tabagisme, dont la fréquence est élevée chez les patients avec des troubles psychiatriques, n’est certes pas une activité recommandable dans cette population non plus, une étude réalisée à Séoul (Corée) et publiée par The Canadian Journal of Psychiatry montre que le sevrage brutal de la nicotine chez des sujets délirants peut s’accompagner d’une récidive du délire.
L’étude en question porte sur 293 patients hospitalisés en psychiatrie « en raison de leur confusion », avec des manifestations délirantes confirmées pour 210 personnes. Les auteurs précisent que le genre de délire le plus commun est celui qualifié de « sous-type hyperactif » (68 % des cas) et qu’il se trouve « lié à une mortalité plus élevée à 3 mois » (rapport de cotes = 2 ,19 [intervalle de confiance à 95 %, IC, 1 ,07–4,49] ; comparativement au type opposé de délire, dit au contraire « hypoactif » (ces deux termes se référant explicitement à une présence ou à une absence d’agitation anxieuse associée au délire). Dans la population étudiée, les 55 sujets (environ 26 %) confrontés à une « cessation soudaine du tabagisme » ont été « plus susceptibles que les non-fumeurs » de présenter un délire hyperactif. Une analyse multivariée précise que le sevrage soudain du tabagisme constitue un « facteur de risque indépendant » du délire hyperactif (rapport de cotes = 10,33 [IC 2,31–46,09] ). De plus, l’intensité de la consommation antérieure de tabac est « positivement corrélée à la gravité de l’hyperactivité. »
Suggérant qu’un sevrage progressif du tabagisme est préférable pour cette catégorie de patients à un sevrage brutal, cette parenté insolite entre le sevrage tabagique et la réactivation d’un délire révèle aussi, pour les auteurs, une probable proximité dans le déterminisme physiopathologique de l’addiction à la nicotine et celui du délire hyperactif, dans la mesure où ces deux problématiques impliqueraient en commun « les systèmes dopaminergiques, opioïdes et cholinergiques. »
Dr Alain Cohen