
Le collectif des 17 organisations à l’origine du mouvement infirmier unitaire du 8 novembre a lancé une pétition pour exiger le respect de l’exercice infirmier et une réelle concertation pour la refonte du décret infirmier de 2004. Elles sont maintenant 24 organisations à appeler à la signature de cette pétition et à dénoncer « la vente à la découpe » des compétences des infirmier(e)s, dont l’Ordre National des Infirmiers (ONI), l’Académie des Sciences Infirmières (ASI) et le Collège Infirmier Français (CIF).
Un décret non réactualisé
La pétition ( https://www.change.org/p/fran%C3%A7ois-hollande-professionnels-fili%C3%A8re-infirmi%C3%A8re-exigeons-de-l-actualisation-de-notre-d%C3%A9cret) qui circule sur Internet, mais aussi sur papier, en est aujourd’hui à 3 267 signataires. Elle sera remise au Président de la République, au Premier ministre, et à la ministre de la Santé. Les organisations syndicales, associatives et ordinale AEEIBO, AFIC, AFDS, ANEIA, ANFIIDE, ANISP, ANPDE, ASI, CEEIADE, CEEPAME, CEFIEC, CIF, CNI, Convergence infirmière, FNI, ONI,ONSIL, SNIA, SNICS-FSU, SNIES-UNSA, SNIIL, SNPI CFE-CGC, SNIPUERLIB, UNAIBODE, UNIDEL y exigent l’ouverture urgente d’une concertation pour l’actualisation du décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux actes et à l'exercice de la profession infirmière et de l'arrêté fixant la liste des dispositifs médicaux avec les organisations syndicales, associatives et ordinale de la filière infirmière.
Pour les professionnels de la filière infirmière, l’actualisation doit prendre en compte une vision globale de l'évolution du système de santé au regard des besoins de la population, des nouvelles technologies et des nouveaux modes d'organisation des soins ; la reconnaissance des consultations infirmières et infirmières spécialisées de première et deuxième lignes ; la révision de la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) prenant en compte les activités de soins infirmiers pratiquées au quotidien, notamment dans le champ de la prévention et de l'éducation.
Les professionnels infirmiers sont attachés à l'architecture actuelle du décret infirmier, qui freine les glissements de tâches vers des métiers du sanitaire ou du social moins qualifiés, dans la recherche du moindre coût aux dépens de la qualité des soins. Mais la non réactualisation du décret de 2004, alors que les pratiques ont évolué, entraine une insécurité de l'exercice de 600.000 infirmières.
Opposés au glissement des taches
Suite aux dernières annonces du cabinet de Marisol Touraine l’ensemble de ces organisations de professionnels de la filière infirmière dénoncent une « vente à la découpe »des compétences infirmières.
Dans le cadre de la réingénierie des formations d'aide-soignant et d'auxiliaire de puériculture(AS/AP), le ministère souhaite modifier à la marge le décret infirmier au bénéfice du métier d’aide-soignant, dès décembre 2016, explique la lettre qui accompagne la pétition. « Bousculer le cadre juridique d’une profession, pour répondre aux attentes du lobby des directions d’EHPAD sur les glissements de tâches est une nouvelle forme de mépris envers la profession infirmière », souligne-t-elle. « Il est urgent de nous mobiliser avant le 6 décembre, date de la réunion de finalisation des référentiels des aide- soignants par le ministère » presse l’Unaibode.
Malgré l’avis du Haut Conseil des Professions Paramédicales (HCPP), le ministère souhaite aussi autoriser l’accès partiel de la profession infirmière en France à des Européens sans diplôme d’infirmier, mais qui pourraient exercer malgré tout certains actes infirmiers dans le cadre d’une profession intermédiaire entre aide-soignante et infirmière, telle qu’infirmière assistante, infirmière auxiliaire, auxiliaire de santé.... « C’est déprécier notre diplôme et tromper les patients. Dérive qui ne peut qu’attirer tous ceux qui favorisent déjà les glissements de tâches dans leurs établissements, afin de réaliser des économies par la réalisation de soins lowcost », accusent les professionnels de la filière infirmière.
Le HCPP s’est opposé presque unanimement le 27 octobre au projet d’ordonnance qui prévoit, dans le cadre de la transposition d'une directive européenne établie en 2013 ( http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex:32013L0055), d'approuver des professions intermédiaires de niveau inférieur au diplôme d'Etat infirmier. Mais son avis n'est que consultatif, et c’est le Conseil d'Etat qui doit trancher.
Dominique Monnier