
Dans les pays en développement une croissance rapide en poids durant les premières années est bénéfique pour la santé mais les effets à long terme ne sont pas aussi clairs. Dans les pays développés, les études ont montré une augmentation du risque cardiovasculaire et métabolique. Dans les pays en développement, l’effet d’un gain pondéral rapide est différent : pendant les 2 premières années la masse maigre est augmentée à l’âge adulte ; après 2 ans, masse maigre et masse grasse sont augmentées. Aussi, les conséquences à long terme dépendent de l’âge de la prise pondérale. Dans la première enfance, hypotrophie et retard de taille sont négativement associés aux performances cognitives et à la durée de la scolarité. La croissance en taille des premières années pourrait avoir un rôle sur les performances scolaires plus important que la prise pondérale.
Une équipe de Pelotas (Brésil) a évalué l’association entre poids de naissance, statut nutritionnel, croissance linéaire et prise pondérale relative dans l’enfance, avec les tests de performance, les années de scolarité et le revenu mensuel à 30 ans. En 1982, 5 914 nouveau-nés ont été sélectionnés dans 5 maternités de la ville : ils ont été examinés et leurs mères interrogées. En 1984-86, 4 979 d’entre eux ont été revus puis en 2012, 3 701, les autres étant perdus de vue ou décédés ; 3 611 de ces sujets ont pu avoir une mesure du QI à 30 ans (61,1% de la cohorte initiale) et on disposait de données plus complètes sur le statut nutritionnel à 2 et 4 ans pour 2 477 (41,9 %) d’entre eux.
Grandir vite aurait une influence sur le QI à l’âge adulte
En moyenne, leur QI était de 98, ils avaient suivis une scolarité pendant 11,4 ans et leur revenu moyen était à 1 593 real (495€). Après contrôle des facteurs de confusion, comme le niveau scolaire et les revenus des parents, il est apparu que le poids de naissance, le poids et le rapport poids/taille à 2 et 4 ans étaient positivement associés au QI, aux années de scolarité et aux revenus à l’âge adulte (sans association entre taille à 2 ans et revenus.
La croissance conditionnelle, qui exprime la façon dont un enfant dévie de la taille ou du poids estimés en fonction des mesures précédentes et des normes de la population étudiée, a été analysée. La croissance conditionnelle en taille à 2 ans supérieure ou égale à 1 déviation standard au-dessus des valeurs attendues comparée aux valeurs au-dessous était associée à une augmentation du QI de 4,28 points (intervalle de confiance à 95 % [IC]2,66-5,90), une scolarité plus longue de 1,58 ans (IC 1,08-2,08) et une augmentation du revenu mensuel de 303 real (IC 44-563 ; 91,5€, IC 13,3-170). Le gain relatif en poids au-dessus de la valeur attendue en fonction de la croissance en taille, n’était pas associé à ces évolutions.
Ainsi, dans un pays à revenus moyens, la vitesse de croissance en taille des 1 000 premiers jours paraît influer sur le QI à l’âge adulte, la scolarité, les revenus. Un gain pondéral supérieur à la valeur attendue pour la taille n’améliore pas les performances.
Pr Jean-Jacques Baudon