
Paris, le samedi 6 mai 2017 – Le délicat équilibre de la relation médecin/malade est tout à la fois que chacun doit demeurer dans son rôle, mais également que les praticiens doivent pouvoir faire preuve d’empathie et de ce fait être capables de se figurer à la place de leur patient. Pourtant, leur connaissance technique et médicale très pointue des pathologies ne leur permet pas toujours d’avoir une parfaite appréhension des difficultés quotidiennes auxquelles leurs patients sont confrontés. Cette dimension est particulièrement sensible en ce qui concerne les patients atteints de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) qui en raison du tabou qui pèse sur les principales contraintes de leur pathologie souffrent de l’incompréhension de leur entourage, de la société, voire même des professionnels.
Pour améliorer la perception de tous et notamment des soignants, les laboratoires Takeda et l’Association François Aupetit dédiée à la lutte contre les maladies intestinales inflammatoires chroniques ont développé le programme In Their Shoes. Ce dispositif vise à immerger le participant dans le quotidien d’une personne atteinte de MICI. Le sujet va donc être équipé d’une ceinture simulant les douleurs abdominales, de couches pour prévenir les accidents ou encore d’un désodorisant à utiliser après chaque passage aux toilettes... Par ailleurs, le participant est connecté à une application qui tout au long de la journée et de la nuit, lui adresse des défis. Il s’agit principalement de courir aux toilettes le plus vite possible, mais il peut également être nécessaire de préparer ses vêtements de rechange, ou encore de contacter son médecin.
La solitude du malade
Déjà testé par 230 volontaires, In their Shoes vient d’être
utilisé pour la première fois par une équipe soignante : une
dizaine d infirmières, d’aides soignantes, de secrétaires et deux
médecins du service de gastro-entérologie de l'hôpital Rangueil
(Toulouse) ont participé à cette expérience. Les professionnels ont
pu mesurer la fatigue provoquée par les astreintes quotidiennes
liées à la maladie et les obstacles auxquels sont constamment
confrontés les patients. « Là où j'ai vraiment pris conscience
des difficultés c'est quand il a fallu que je passe 15 minutes aux
toilettes après ma douche, ça a bouleversé toute mon organisation
matinale très minutée », a ainsi remarqué l’une des cadres du
service citée par la Dépêche du Midi. Les participants ont
également été nombreux à insister sur la complexité de trouver des
toilettes en urgences. Les contraintes alimentaires ont par
ailleurs été mieux perçues par beaucoup. Les professionnels ont
enfin pu jauger la solitude ressentie par les malades face aux
réponses apportées par le monde médical. « Ce qui m'a
interpellée c'est la discussion avec la comédienne infirmière par
rapport à mes douleurs. Quand elle m'a dit qu'elle ne pouvait rien
pour moi, j'ai raccroché comme un patient soumis » se souvient
ainsi Myriam Ferrand, une des infirmières en charge de l'éducation
thérapeutique. « C'était pénible mais ça valait le coup
pour cultiver l'empathie et la solidarité auprès de nos patients.
Vivre leur maladie, très embêtante, c'est encore plus émouvant
», conclue le Dr Jacques Moreau.
Pour l’ensemble des participants, il est certain que vivre une
telle expérience est un atout pour améliorer leur relation avec
leurs malades.
Léa Crébat