
Tempête dans un ciel serein
Cette affaire a suscité chez les gynécologues un mélange de surprise et de circonspection. « Nous sommes étonnés de l’ampleur qu’à pris cette polémique. Cela fait vingt ans que ce stérilet est utilisé et qu’il rend vraiment service à de nombreuses femmes. Il y a toujours eu une faible fréquence des effets secondaires. Ça reste un super produit qui rend beaucoup plus de services que d’inconvénients. Maintenant, individuellement parlant, il est possible que des personnes aient eu des effets secondaires » remarquait au printemps Bernard Hédon, ancien président du Collège national des gynécologues obstétriciens français. L’ANSM pour sa part ne put ignorer longtemps la situation et annonça qu’une enquête était déjà en cours dont elle promit les premiers résultats en juin. Consolidées, les conclusions des travaux viennent d’être présentées.Cinq fois plus de cas en quatre mois qu’en vingt ans !
L’augmentation spectaculaire des signalements d’effets secondaires est confirmée : seuls 510 avaient été rapportés en 20 ans (entre 1997 et le 15 mai 2017) quand 2 714 ont été enregistrés entre mai 2017 et le 4 août, dont «1 789 rapportés comme graves par les femmes, c’est-à-dire déclarés comme ayant des conséquences sur leur vie familiale, professionnelle ou sociale ». La concomitance avec la médiatisation du groupe Victimes du stérilet hormonal Mirena, en l’absence de tout autre événement (aucune modification du stérilet notamment) ne peut-être une simple coïncidence. De même que l’ouverture du portail des signalements du ministère de la santé, qui facilite les déclarations, a probablement eu une influence.Des effets pour la plupart connus
Parmi les effets déclarés depuis ce printemps, « la plupart » renvoient à des effets secondaires signalés dans la notice : « les céphalées, la dépression, la perte de cheveux, l’acné, les douleurs abdominales, la diminution de la libido, les bouffées de chaleur et la prise de poids », énumère l’ANSM. D’autres mériteraient d’être dorénavant signalés, telles l’asthénie et la séborrhée, juge l’agence au vu des données de l’enquête de pharmacovigilance. L’ANSM préconise par ailleurs des investigations complémentaires en ce qui concerne « les arthralgies, l’érythème noueux, le psoriasis et l’hypertension intracrânienne (HTIC). Pour l’HTIC, une évaluation sera menée ultérieurement au niveau européen », précise le communiqué de l’agence.Anxiété : des données non concluantes
Demeure la question particulière de l’anxiété. Cette dernière concerne un grand nombre de signalements : 870 depuis le 15 mai 2017 (contre trente au total au cours des vingt dernières années). Une analyse comparative réalisée par l’Assurance maladie suggère un « risque faible mais augmenté de mise sous anxiolytique chez les femmes porteuses de Mirena comparativement aux porteuses de DIU au cuivre » signale l’ANSM. Cependant, parallèlement, les travaux de l’Agence européenne du médicament ont conclu « qu’il n’y a pas, à ce stade, suffisamment de données pour établir une association entre l’utilisation d’un DIU contenant du lévonorgestrel avec une anxiété isolée, une attaque de panique, des troubles du sommeil ou une agitation. Les troubles de l’humeur ont été considérés comme liés à la dépression ou à l’humeur dépressive, déjà mentionnés dans les documents destinés aux professionnels de santé (RCP) et aux femmes (notice) ».Dans la lignée de l’affaire Lévothyrox ?
Face à ces différents résultats, l’ANSM insiste sur l’importance d’une information attentive des femmes auxquelles est proposée l’utilisation du stérilet Mirena. Sans doute ces données devraient-elles, à l’instar de l’affaire Lévothyrox qui connaît quelques similitudes avec celle du Mirena, une nouvelle fois, inciter à une réflexion sur le rôle des réseaux sociaux et sur le possible effet contre-productif du nouveau portail de signalement des effets secondaires.Aurélie Haroche