Santé des trans : tout un combat

Le Dr Bertrand Riff, dans le cadre d’une session dédiée à la santé des personnes LGBTQI (pour Lesbienne, Gay, Bi, Trans, Queer et Intersexe) est venu représenter la "Maison dispersée de santé" (MDS), centre médical d’un genre particulier dont il est le co-fondateur à Lille. Ce lieu d’exception s’est donné pour mission de prendre en charge ceux qui se considèrent laissés pour compte du système médical classique. Né en 1986, le collectif pluri-disciplinaire s’est d’abord occupé d’IVG, puis de personnes infectées par le VIH, de dépendance aux substances psychoactives, et aujourd’hui de plus en plus de personnes transsexuelles. On parle d’ailleurs plutôt ici de "transidentité" précise Bertrand Riff.

Le vocabulaire est ici particulièrement choisi et semble être d’une importance capitale. C’est en tout cas ce que professe l’orateur, qui fustige en des termes violents l’utilisation, encore aujourd’hui, par certains chirurgiens du terme "monsieur" quand il s’agit de désigner une personne voulant devenir une femme. Ici, la parole des patients est totalement acceptée : « toutes les expertises se valent ».  On pourrait résumer (probablement à outrance) la mission de la MDS en disant qu’elle tente de faciliter l’accès à l’hormonothérapie aux personnes qui veulent effectuer une transition, et plus largement les accompagner, « accompagner le désordre ».

Des hommes devenues femmes qui veulent garder un pénis

La MDS semble donc s’être construite en opposition à un système "officiel", qu’elle juge maltraitant, représenté essentiellement par la SOFECT (Société Française de Prise En Charge du Transsexualisme). Elle en dénonce le caractère très normatif, très « années 50 », dans lequel une expertise très longue (sur un ou deux ans) par un psychiatre est un passage obligatoire, et où seules les transitions d’homme à femme, ou de femme à homme sont prises en charges et accompagnées. La MDS, elle, écoute toutes les voix, y compris les femmes devenues hommes qui veulent garder un vagin, et les hommes devenues femmes qui veulent garder un pénis. Elle les accompagne et gère leurs problèmes de santé, sur la base d’une expérience forgée par les années et les échanges avec les confrères belges, considérés comme plus avancés sur la question.

Le cœur de la question est donc d’apprendre à manier l’hormonothérapie, habituellement prescrite par des endocrinologues que Bertrand Riff considère comme faisant également partie d’un système "officiel" trop rigide : « l’Androcur est un produit castrateur, c’est pour ça que les endocrinologues en donnent ».

Face au DIU de la SOFECT, Bertrand Riff promet de créer prochainement des formations sur le maniement de ces hormonothérapies, et notamment sur les taux de testostérone à atteindre en fonction des situations et des demandes des personnes prises en charge. On l’a compris, la question est ici abordée de façon passionnée. Si le ton et les prises de position paradoxalement très « tranchées » ne seront pas du goût de tout le monde (et surement pas de la SOFECT !), nous pouvons laisser les lecteurs se faire une idée !

Dr Alexandre Haroche

Référence
Betrand Riff. De l’accompagnement de la transidentité à la Maison dispersée de santé : possibilité d’intervention avec patient expert, orthophoniste, kinésithérapeute et infirmier. 12e Congrès médecine générale France. 5 au 7 avril 2018, Paris.

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