Alimentation : bientôt un retour de la gabelle ?

Paris le mercredi 29 aout 2018 - La commission d’enquête parlementaire sur l’alimentation industrielle devrait proposer dans son rapport remis en septembre d’instaurer une taxe sur les produits trop salés, sur le modèle de la taxe soda.

La gabelle, la très impopulaire taxe sur le sel de l’Ancien Régime, pourrait réapparaitre. Selon le Figaro, la commission d’enquête parlementaire sur l’alimentation industrielle pourrait proposer d’instaurer une taxe sur les produits trop salés. Cette taxe devrait suivre le même modèle que la taxe soda, instauré en 2012 sur les boissons sucrées. La taxe sera donc proportionnelle au taux de sel dans le produit imposé.

Les produits alimentaires industriels, tels que les pains artisanaux et les plats préparés, sont en effet les principaux responsables de la surconsommation de sel dénoncés par les membres de la commission. Si les industriels se sont engagés, depuis 2013, à diminuer de 15 à 30 % la teneur en sel et sucre de leurs produits, le président de la commission Loïc Prud’homme juge ces engagements volontaires « peu contraignants et insuffisants ». Comme autres mesures, la commission propose de renforcer la sensibilisation à une alimentation équilibrée dans les écoles et de limiter les publicités à la télévision pour les produits trop salés dans les programmes jeunesse.

Mais cette taxe a peut être perdu toute raison d’être. En effet, les députés la justifient par la consommation excessive de sel des Français, 12 grammes par jour, soit deux fois plus que les 5 grammes par jour recommandés par l’Organisation mondiale de la santé. Mais une étude de l’université McMaster au Canada, publié dans le New England Journal of Medecine, pourrait changer la donne. Selon cette étude, la consommation de sel associée au risque de maladie cardiovasculaire le plus faible serait de 11,8 grammes par jour, soit assez proche de la consommation actuelle des Français. Le rapport entre consommation de sel et mortalité suivrait une courbe en J. Ainsi, à 11,8 grammes de sel par jour, il serait plus nocif de diviser sa consommation par deux que de la doubler ! Au vu de ses informations, les députés vont-ils instaurer une taxe sur les produits trop peu salés ?

Quentin Haroche

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Vos réactions (1)

  • Trop de sel est néfaste

    Le 31 août 2018

    Premièrement, la publication du Lancet n'apporte rien de très neuf par rapport à ce qu'on sait de longue date. Elle persiste dans certaines erreurs d'interprétation dont on ne peut que conseiller aux journalistes de faire une analyse plus attentive, même si leurs lecteurs préfèrent le sensationnalime.
    Voyez par exemple le communiqué de MacGregor & Co :
    http://www.actiononsalt.org.uk/news/news/2018/news-stories/action-on-salt-response-to-lancet-publication.html
    Deuxièmement, il faut bien comprendre que le problème du sel est essentiellement qu'on n'est pas maître de ce qu'on ingère, puisqu'on ne prépare plus rien soi-même. L'équilibre nutritionnel de la population est à présent totalement sous la responsabilité des producteurs alimentaires, qu'ils soient industriels ou artisanaux. L'excès de salage (quelles qu'en soient les nombreuses raisons, plus ou moins recevables) est une menace pour la santé de certaines catégories de population, et particulièrement pour l'avenir des enfants. Il faut donc prendre toutes les mesures utiles pour limiter l'ajout de sel dans les fabrications alimentaires.
    Il faut remarquer que les personnes les plus exposées aux méfaits d'un excès chronique de sel alimentaire sont celles qui ont les moindres capacités (pécuniaires ou intellectuelles) de contrôler leur consommation. Ce sont elles les premières victimes de la malbouffe, qu'il faut protéger.
    Aucun consommateur ne devrait avoir à vérifier lui-même que ce qu'il achète a été élaboré selon de bonnes pratiques sanitaires. L'Etat devrait garantir que tous les professionnels de l'alimentation respectent des normes qui protègent les consommateurs. Le chlorure de sodium est un additif alimentaire et son usage doit être réglementé. De nombreux pays ont pris des mesures dans ce sens, et notamment pour fixer une limite légale au taux de sodium dans les pains et produits panifiés (premiers contributeurs aux apports sodiques). Il serait aisé de faire de même pour de nombreux produits de consommation courantes.
    L'idée d'une taxe n'est pas à rejeter, mais une réglementation contraignante serait peut-être suffisante, et il est en tous cas nécessaire de l'adopter en priorité pour la boulangerie et les fabrications industrielles.
    Reste la question des salaisons artisanales traditionnelles (de viandes, poissons, fromages), dont toute consommation excessive doit faire l'objet de mises en garde, mais qui ne représentent pas de risque principal en dehors de certaines habitudes alimentaires déviantes.
    Il faudra donc continuer à sensibiliser la population aux risques d'une alimentation trop riche en sel et surtout trop riche en sucres. Et surtout commencer à mieux former et informer les médecins sur ces questions qu'ils prennent très insuffisamment en compte dans leur pratique.

    Dr Pierre Rimbaud
    www.salt.asso.fr

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