Valsartan contaminé : quel risque cancérigène ?

En juillet 2018, les autorités sanitaires ont été alertées par la présence, dans certains lots de valsartan, de N-nitrosodiméthylamine (NDMA). La contamination concernait spécifiquement les produits fabriqués par Zhejiang Huahai Pharmaceuticals, une compagnie chinoise, et semble en rapport avec des modifications dans le processus de fabrication entreprises en 2012. Les Agences sanitaires européennes aussi bien que la US Food and Drug Administration décidaient alors de retirer du marché tous les lots contaminés. Cette décision était motivée par le fait que le NDMA est un cancérigène bien connu pour l’espèce animale, lors de l’exposition à une dose unique comme à de faibles doses au long cours. Aucune donnée précise n’est toutefois disponible jusqu’à présent pour l’espèce humaine, mais l’Agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer (IARC) classe le NDMA comme « probablement cancérigène pour l’homme (groupe 2A) », s’appuyant sur le fait que le métabolisme du NDMA semble identique dans les tissus humains et dans le tissu de rongeurs.

Étude observationnelle au Danemark

Pour en savoir un peu plus sur les conséquences de la diffusion sur le marché des lots contaminés, une équipe danoise a mené une étude observationnelle de cohorte. L’objectif était de fournir des informations pour permettre aux autorités sanitaires d’évaluer rapidement le risque. Ont été inclus dans cette étude 5 150 danois âgés de 40 ans ou plus, sans antécédent de cancer et utilisant du valsartan au moins depuis janvier 2012 et jusqu’au 30 juin 2017. Les patients ont été inclus après une période d’observation de 1 an (« lag time period »), puis suivis pendant en moyenne 4,6 ans.

Le premier constat est que les lots contaminés représentent environ la moitié des lots distribués.

Dans cette étude, 3 450 participants ont été exposés à des lots contaminés, constituant au total un suivi de 11 920 personnes-années.

Des données a priori rassurantes

Les données sont a priori rassurantes, puisqu’il n’apparaît pas de lien entre l’exposition à des lots contaminés et la survenue d’un cancer (Hazard Ratio HR ajusté 1,09 ; intervalle de confiance à 95 % IC 0,85 à 1,41), ni d’élément indiquant un possible effet dose-réponse. L’analyse par type de cancer ne permet toutefois pas d’exclure définitivement le risque d’association, puisqu’il apparaît une augmentation du risque de cancer colorectal (HR 1,46 ; IC 0,79 à 2,73) et de cancer de l’utérus (HR 1,81 ; IC 0,55 à 5,90), mais cette augmentation n’est pas statistiquement significative. Concernant les autres types de cancer, l’analyse de leur incidence n’est pas possible du fait de leur faible nombre.

Une association entre l’exposition au NDMA et des cancers gastro-intestinaux, des poumons, des reins et du foie a été retrouvée chez l’animal, pour des doses d’environ 10 μg/kg/jour. Avec une contamination de 22 μg dans les comprimés dosés à 320 mg de valsartan et de 10 μg pour ceux de 160 mg, l’exposition moyenne pour une personne de 70 kg s’établit entre 0,14 et 0,31 μg/jour. Les auteurs reconnaissent qu’il n’est pas possible d’extrapoler directement de l’animal à l’homme, mais que cette dose est malgré tout 30 fois inférieure à la dose la plus faible incriminée dans le cancer du foie chez le rat. Des données plutôt rassurantes donc, mais qui appellent toutefois un suivi à plus long terme.

Dr Roseline Péluchon

Références
Pottegård A et coll. : Use of N-nitrosodimethylamine (NDMA) contaminated valsartan products and risk of cancer: Danish nationwide cohort study.

Copyright © http://www.jim.fr

Réagir

Vos réactions

Soyez le premier à réagir !

Les réactions aux articles sont réservées aux professionnels de santé inscrits
Elles ne seront publiées sur le site qu’après modération par la rédaction (avec un délai de quelques heures à 48 heures). Sauf exception, les réactions sont publiées avec la signature de leur auteur.

Réagir à cet article