Cigarette électronique : les recommandations du Haut conseil de la santé publique
La cigarette électronique (ou e-cigarette), désormais bien connue
du grand public, désigne un dispositif électrique destiné à
vapoter, c’est-à-dire à inspirer une vapeur aromatisée obtenue par
l’échauffement d’une solution liquide présente dans le flacon,
enrichie ou non en nicotine. Les recharges se présentent sous forme
de flacons de « e-liquides » composés de propylène glycol ou de
glycérol, de divers arômes et éventuellement de nicotine.
Les usagers et les professionnels de santé se sont rapidement
emparés du vapotage en tant que moyen capable de réduire les
risques du tabagisme chronique, en termes notamment de mortalité et
de morbidité, et d’aider au sevrage. Au-delà de cet engouement, les
enjeux considérables du vapotage à l’échelon de la collectivité
avaient amené le Haut conseil de la santé publique (HSCP) à émettre
un avis en avril 2014, concernant une pratique d’emblée largement
empirique.
Le premier avis se voulait prudent dans ses recommandations. Il
soulignait le fait que la diffusion d’un nouveau mode de délivrance
de la nicotine en population générale pouvait avoir des
conséquences non désirées, comme la « renormalisation » de
la consommation de tabac, mais aussi le risque d’initiation à la
nicotine - substance hautement addictive - par les plus jeune.
Toutefois cet avis reconnaissait aussi le vapotage comme un outil
potentiel de réduction des risques du tabac fumé, voire un outil
d’aide à l’abstinence nicotinique. La balance entre risques et
bénéfices, du fait du manque de connaissances scientifiques,
amenait donc à une conclusion prudente sur son usage.
Une actualisation des recommandations justifiée à plus d’un
égard
Nombre d’associations médicales françaises, d’usagers et de
professionnels de santé souhaitaient une clarification du statut de
la cigarette électronique. Il importait aussi de se prononcer sur
son intégration éventuelle en tant qu’outil de sevrage et de
réduction des risques dans le Programme national de réduction du
tabagisme. C’est dans ce contexte que la Direction générale à la
santé et la Mission interministérielle de lutte contre les drogues
et les conduites addictives ont conjointement saisi le HCSP pour
une actualisation du précédent avis.
Si la littérature scientifique s’est depuis 2014 enrichie de
publications nouvelles, force est de reconnaître que les
contradictions et insuffisances demeurent au programme, tout autant
que les lectures à double sens. Les dissonances entre toxicologie,
épidémiologie et pratiques courantes restent d’actualité et les
recommandations du HCSP tentent d’harmoniser autant que faire se
peut les enseignements de la littérature scientifique et les
pratiques de terrain relevant des usagers et des professionnels de
santé. Mission ardue qui est alimentée par la réflexion nécessaire
et le souci de répondre aux impératifs de la santé publique, quitte
à s’attirer des critiques reflétant le pluralisme des opinions et
avis sur un sujet brûlant.
En plus de la demande formulée par les parties prenantes,
l’avis du HSCP repose in fine sur le constat suivant : (1)
prévalence élevée du tabagisme en France (environ un tiers des
15-75 ans) ; (2) prévalence croissante des utilisateurs de la
cigarette électronique : en 2014, plus de 25 % des 15-75 ans
déclaraient avoir tenté de recourir à cette dernière, le nombre des
utilisateurs quotidiens étant compris entre 1,2 et 1,5 million (2,9
% de la population française) ; (3) difficultés des enquêtes
épidémiologiques ; (4) efficacité incertaine dans l’aide au sevrage
tabagique et recommandations fluctuantes d’une autorité ou d’une
société savante à l’autre ; (5) atouts de la cigarette électronique
en termes de toxicité cardio-respiratoire, notamment du risque de
cancer bronchique, par rapport à la combustion du tabac ; (6) Selon
le Baromètre santé 2014 de Santé publique France : un fumeur qui
utilise également une e-cigarette diminuerait sa consommation de
tabac, en moyenne, de 9 cigarettes par jour ; (7) Alors que l’usage
de celle-ci est répandu en France, les relations entre vapotage et
aide à l’arrêt du tabac restaient encore peu documentées tout en
offrant des perspectives qui se devaient d’être mieux mises en
valeur, eu égard aux conséquences délétères du tabagisme
chronique.
Les recommandations ont ainsi pris en compte la demande
globale d’informations et le progrès des connaissances
scientifiques pour réévaluer le rapport bénéfice-risque de la
cigarette électronique dans la population générale.
Il ressort de cette approche nouvelle et actualisée
que la cigarette électronique :
• peut être considérée comme un outil d’aide au
sevrage tabagique au sein des populations de fumeurs, désireux
d’arrêter leur consommation de tabac ;
• constitue un outil de réduction des risques du
tabagisme, encore qu’en cas d’usage concomitant du tabac et de la
cigarette électronique par les « vapofumeurs », le débat
puisse rester ouvert ;
• pourrait constituer de facto un point d’entrée
dans le tabagisme, notamment chez les adolescents, mais ce risque
serait contrebalancé par le fait qu’elle pourrait aussi retarder ce
passage à l’acte ;
• induit un risque de «
renormalisation » de la consommation de tabac compte tenu de
l’image positive véhiculée par son marketing et sa visibilité dans
les espaces publics.
En conséquence, le HCSP recommande dans son nouvel
avis :
• de poursuivre et d’intensifier les politiques
de lutte contre la consommation de tabac ;
• d’informer, sans en faire publicité, les
professionnels de santé et les fumeurs des avantages et des
inconvénients de la cigarette électronique ;
• de maintenir les modalités d’interdictions de
vente et de publicité prévues par la loi de modernisation du
système de santé et d’étendre l’interdiction d’utilisation à tous
les lieux à usage collectif ;
• de renforcer les études épidémiologiques
incluant les études d’observation sur le tabagisme et la cigarette
électronique, tout en lançant des recherches en sciences humaines
et sociales sur le sujet ;
• de poursuivre les efforts de labellisations et
de marquages pour assurer le maximum d’information aux
consommateurs et assurer leur sécurité (contenu du e-liquide,
packaging) ;
• de communiquer sur l’interdiction de vente aux
mineurs des e-cigarettes et sur le risque du vapotage pour la femme
enceinte ;
• de procéder à l’observation périodique des
niveaux et modes de consommation de la e-cigarette.
Le HCSP invite aussi l’Organisation mondiale de la santé
à réunir un panel d’experts en vue de l’établissement de
recommandations concernant la cigarette électronique. Ces dernières
pourraient être incluses dans la future version de la Convention
Cadre pour la lutte anti-tabac et permettre ainsi une visibilité
réglementaire internationale accrue sur ce produit dont l’usage
varie d’un continent à l’autre, au gré de dispositions qui
mériteraient d’être harmonisées.
En outre, le HSCP incite les autorités compétentes ainsi que
les parties prenantes, à engager rapidement une réflexion sur
l’intérêt et la faisabilité d’une cigarette électronique
médicalisée qui ferait l’objet d’une prescription entrant dans le
champ du sevrage tabagique et d’un remboursement, au même titre que
les substituts nicotiniques, en bénéficiant ainsi du réseau des
officines de pharmacie. Une telle avancée donnerait à l’évidence
encore plus de crédit à la e-cigarette, ce qui supposerait une AMM
et des études contrôlées qui font encore cruellement défaut dans le
dossier actuel.
Ayant assisté à une conférence du Dr Lowenstein, addictologue bien connu, sur l'addiction au tabac, il nous a clairement fait comprendre que l'idéal est effectivement de ne pas fumer. Cependant, face à l'impossibilité de certaines personnes à arrêter de fumer, il considère que le passage de la cigarette traditionnelle à la cigarette électronique est un moyen efficace de réduire le nombre de cancers du poumon car ce qui tue, ce n'est pas la nicotine mais la COMBUSTION du tabac. Or, avec la e- cigarette,le liquide est chauffé. Le liquide peut comporter ou non de la nicotine. Les effets néfastes de la cigarette sont donc fortement réduits et personnellement, je proposerai plutôt la e-cigarette à un patient qui tente d'arrêter de fumer plutôt que de se bourrer de gommes à mâcher ou d'anxiolytiques, d'être mal dans sa peau, frustré, acariâtre. S'il retrouve de la sérénité et une qualité de vie qui lui convient en passant à l'e-cigarette, je pense que j'aurais aidé pour ne pas dire "sauver" quelqu'un . Je suis donc en faveur d'une cigarette électronique médicalisée, prescrite dans le champ du sevrage tabagique.