
Une étude, menée en 2012 auprès d’un échantillon national de 3
603 femmes enceintes ou ayant récemment accouché, montrait que 16,1
% des femmes enceintes fumaient quotidiennement (1). Certes
meilleurs que ceux enregistrés dans le passé, puisque, en 2008, la
France comptait 22 % de fumeuses au cours du
3e trimestre de la grossesse (se rangeant
ainsi au 1er rang des pays européens où l’usage du tabac était le
plus élevé [2]), ces chiffres restent encore trop élevés. En effet,
on sait que le tabac est la première cause évitable des
complications périnatales, au premier rang desquelles se situe la
prématurité, dont le risque est 2,5 fois supérieur au-delà de 10
cigarettes par jour (2). Le projet de grossesse et la grossesse
apparaissent donc comme des moments privilégiés pour sensibiliser
les couples au sevrage tabagique.
Évaluer le statut tabagique à tous les stades de la grossesse
Aide au sevrage
En effet, le sevrage tabagique a des effets bénéfiques quel
que soit le terme de la grossesse. Il est recommandé d’associer le
conjoint au projet de sevrage, d’autant plus s’il est lui-même
fumeur.
L’évaluation de la dépendance physique est la première étape
du bilan, réalisée par le test de Fagerström. La mesure du CO
expiré peut être une façon de motiver les patientes pour l’arrêt du
tabac, en même temps qu’elle permet de repérer celles à risque de
complications (2). Des échelles visuelles analogiques permettent
d’évaluer la dépendance psycho-comportementale (2) et des échelles
d’évaluation spécifiques de repérer un état dépressif et/ou
anxieux.
La varénicline et le bupropion sont contre-indiqués chez les
femmes ayant un projet de grossesse, enceintes ou allaitantes. En
revanche, les substituts nicotiniques ont l’AMM pour les femmes
enceintes malgré la présence du picto contenant la mention « ce
médicament + grossesse = danger ». La Société francophone de
tabacologie s’est d’ailleurs prononcée contre ce picto, tout en
reconnaissant le caractère nocif de la nicotine lors de la
grossesse. Les différentes formes de substituts peuvent être
associées et les doses ajustées dès la première semaine de
traitement.
Les timbres à la nicotine peuvent être conservés pendant 24
heures en cas de forte dépendance. Les substituts peuvent être
proposés aussi aux femmes ne souhaitant pas arrêter immédiatement
de fumer, pour réduire leur consommation.
L’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des
produits de santé) déconseille la cigarette électronique chez la
femme enceinte. Certains travaux affirment toutefois que, chez les
fumeuses les plus dépendantes, l’utilisation de la cigarette
électronique est moins nocive que la poursuite du tabagisme.
Certaines femmes n’auront pas arrêté de fumer pendant leur
grossesse et se pose alors la question de l’allaitement. Il n’est
pas contre-indiqué et doit plutôt être encouragé, pour
contrebalancer les effets du tabagisme passif sur la santé de
l’enfant, mais la mère devra respecter un délai de 2 heures entre
la cigarette et l’allaitement.
Le suivi du sevrage sera poursuivi au cours du post-partum, et
une attention particulière sera portée à certains moments «
cruciaux », à fort risque de rechute : sortie de maternité,
fin de l’allaitement, reprise du travail, etc.).
Le Plan « Priorité prévention » présenté le 26 mars 2018, a institué le remboursement à 65 % par l’Assurance Maladie de traitements de substitution nicotiniques sur prescription: certaines gommes à mâcher depuis le 22 mars 2018, et certains patchs de nicotine depuis le 16 mai 2018. Le forfait de 150 euros par an est maintenu transitoirement, jusqu’au 31 décembre 2018 pour les substituts nicotiniques non remboursables. |
Dr Roseline Péluchon