Transgenralité : savoir de quoi l’on parle

La 11ème édition de la Classification Internationale de l’OMS sur les maladies et problèmes de santé (ICD11) a rebaptisé « les troubles de l’identité de genre » sous le vocable de « incongruence de genre » et a changé cette « pathologie » de chapitre en la plaçant dans celui des conditions liées à la santé sexuelle. Encore faut-il l’adapter au quotidien, ce qu’une étude internationale menée par Rebeca Robles-Garcia (Mexico) a tenté à travers une évaluation effectuée auprès de personnes transgenres d’Afrique, d’Arabie, d’Europe et d’Amérique Latine sur divers aspects :

- la détresse et le dysfonctionnement sont-ils plutôt liés au rejet social qu’à l’incongruence de genre ?
- la mise en route d’un traitement permettant le changement de sexe (hormones, chirurgie, …) est elle plus dépendante de variables liées à l’incongruence ou à la détresse et un handicap marqués ?
- quelles sont la sensibilité et la spécificité des deux modes diagnostiques pour déterminer la présence d’une incongruence de genre, critères demandant la présence d’une détresse et/ou d’un handicap (DSM-5) ou non (ICD11) ?

Au total, 629 adultes transgenres (dont 72 dans notre pays) ont complété un questionnaire rétrospectif sur leurs expériences en matière d’incongruence de genre, questionnaire reprenant notamment leur désir de changer de genre, leur inconfort physique, la modification de leurs caractéristiques sociales liées au genre et leur souhait d’être traités comme une personne de l’autre genre. Par ailleurs, la détresse, le dysfonctionnement, la violence et le rejet social, ainsi que leur historique médical ou chirurgical de modification d’aspect, ont également été analysés.

La famille en première ligne

Ce sont surtout des femmes transgenres qui ont répondu à ce questionnaire, la majorité rapportant dans plusieurs pays dont la France un historique de transformations corporelles, essentiellement liées à une hormonothérapie. Par ailleurs la grande majorité a concédé avoir souffert de détresse morale et/ou d’un handicap fonctionnel, social en France, et familial dans d’autres pays. La source du rejet social était essentiellement familiale dans la majorité des pays à l’exception -notable- de la France où le rejet était surtout le fait des condisciples à l’école dans 64,3 % des cas, mais sans violence physique majeure.

Quels facteurs motivent le recours à une hormonothérapie ou à la chirurgie ?

Par ailleurs, les personnes transgenres ont eu de grosses difficultés à se faire considérer comme des personnes appartenant à l’autre genre, y compris en France, sans que ce fait n’influence directement le recours à la chirurgie ou l’hormonothérapie pour assurer ces modifications d’apparence. Inconfort corporel et désir d’appartenir à l’autre genre ont un poids égal dans le comportement des personnes transgenres pour lesquelles la validité des critères DSM-5 est au moins équivalente à ceux de l’ICD11. Introduire le critère de « détresse et/ou de dysfonction » ne permet pas non plus de faire la part des choses entre personne transgenre souhaitant un traitement médical et personne transgenre ne le souhaitant pas.

« La décision et la formalisation du changement de genre doit donc rester individuelle dans le plus parfait respect des Droits de l’Homme et conduire à une réponse scientifique adaptée à chaque cas » concluent les auteurs.

Dr Dominique-Jean Bouilliez

Référence
Robles-Garcia R et coll. : Sources of distress and dysfunction among transgender people : an international research programme for ICD-11. 18th World congress of psychiatry (Mexico) : 27-30 septembre 2018.

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